Un plan pour les saisonniers du tourisme annoncé un mois avant l'été

65.000 postes de saisonniers n'ont pas été pourvus en 2022. Avec un plan pour les saisonniers présenté le 31 mai 2023, le gouvernement espère changer la donne. Sans toucher à la réforme de l'assurance-chômage qui pénalise pourtant ces professionnels, le plan s'appuie sur une offre de logements supplémentaires, des formations spécifiques et un meilleur accompagnement.

En 2022, sur 150.000 postes de saisonniers dans le secteur de l'hôtellerie-restauration, la moitié seulement a été pourvue. Des tensions de recrutements qui ont émergé à la suite de la crise sanitaire, et auxquelles le gouvernement a décidé de s'attaquer à travers un plan triennal pour les saisonniers 2023-2025, annoncé le 31 mai 2023 par Olivier Dussopt, ministre du Travail, du Plein Emploi et de l'Insertion, et Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, lors d'un déplacement dans les Landes. Logement, accompagnement, formation, les trois volets du plan se veulent une réponse aux différentes problématiques auxquelles font face les saisonniers. Objectif : relancer le secteur juste avant la période estivale et dans la perspective des Jeux olympiques l'an prochain. Ne contenant rien de particulièrement révolutionnaire - les mesures correspondent davantage à des développements de programmes ou de dispositifs existants -, le plan n'aborde pas la question épineuse des réformes de l'assurance chômage qui ont fortement impacté ces professionnels, et particulièrement le passage de quatre à six mois minimum de travail pour ouvrir des droits aux allocations et la modification du mode de calcul du salaire journalier de référence, qui fait baisser le montant touché par ceux qui enchaînent les contrats courts et les périodes non travaillées. "Il n’est effectivement pas question de revenir sur les règles de l'assurance chômage, confirme le cabinet d'Olivier Dussopt. Dans d'autres pays, dans beaucoup d'autres pays, les conditions d'éligibilité sont à douze mois et ça n'empêche pas qu'il y ait une activité touristique." De même la question des salaires et des conditions de travail est laissée aux branches professionnelles. "Le rôle de l'État doit être un rôle de facilitateur, ce n'est pas à l'État de gérer, et ça, il faut vraiment le dire, parce qu'il y a aussi un partage de compétences, les salaires et toutes les conditions de travail, c'est un travail qui doit être porté par les branches", a insisté le cabinet d'Olivia Grégoire.

6.000 logements d'ici 2025, dans des internats universitaires et scolaires

Premier axe du plan : le logement. Le gouvernement promet 1.300 chambres universitaires des Crous et des bailleurs sociaux ouvertes dès cet été et 6.000 logements d'ici 2025, notamment dans des internats universitaires et scolaires lors des périodes de vacances. Des mesures à décliner avec les régions, puisqu'elles sont propriétaires des logements d'internat scolaire. Le plan prévoit aussi une plateforme en ligne pour regrouper les offres de logements dans les parcs publics, associatifs et sociaux à partir de juin 2023. Autre mesure : encourager les propriétaires privés à mettre en location leur logement au profit des travailleurs saisonniers, via l'utilisation du dispositif fiscal les exonérant d'impôt sur le produit de la location d'un logement loué à un saisonnier. Un dispositif prorogé jusqu'en juillet 2024. Dans le même esprit, le "bail mobilité", un contrat de location de courte durée d'un logement meublé destiné aux étudiants ou aux personnes en mobilité professionnelle, sera "adapté aux contraintes des saisonniers", précise le ministère du Tourisme, car il est "peu utilisé depuis sa création". Un bilan sera fait dans les douze prochains mois.

Le gouvernement souhaite aussi poursuivre les expérimentations en cours dans les régions en matière de logements des saisonniers. "Les solutions de logement pour les saisonniers sont diverses, éparses, elles sont portées par les régions", signale le cabinet d'Olivia Grégoire qui veut créer une boîte à outils sur le sujet pour pouvoir dupliquer ces solutions sur l'ensemble du territoire. Exemple avec la mise en place des logements modulaires déplaçables en Nouvelle-Aquitaine ou des campings municipaux transformés en logements saisonniers à La Baule (voir notre article du 21 juillet 2022).

Côté formation, une enveloppe de 10 millions d'euros par an sera spécifiquement dédiée aux saisonniers pour former de manière accélérée des travailleurs sans prérequis pour un poste, ou pour permettre à des saisonniers de monter en grade.

La moitié des saisonniers ne travaillent pas pendant les intersaisons

"On va créer un certain nombre de formations très courtes, entre 35 heures et 150 heures, pour permettre d'élargir les viviers à des gens qui n'ont pas forcément les compétences requises et prérequises, détaille le cabinet d'Olivier Dussopt. Il peut s'agir de compétences qu'on appelle des soft skills, mais aussi tout simplement de la connaissance de base de l'accueil et puis de la restauration." Une offre de formation qui n'existe pas aujourd'hui ou qui est très faible.

En matière d'accompagnement, l'idée est de fidéliser les saisonniers qui souvent ne rempilent pas d'une saison sur l'autre. "Ce qu'on sait, c'est qu'à peu près la moitié des saisonniers, sans parler des étudiants, ne travaillent pas pendant les intersaisons, indique-t-on au cabinet d'Olivier Dussopt. Ils vivent soit de l'assurance chômage pour un grand nombre, soit de rien pour un grand nombre aussi." Il s'agirait de faire en sorte que Pôle emploi et la mission locale rencontrent chaque année avant la fin de la saison et avec l'aide de l'employeur, tous les saisonniers pour leur proposer des formations et des emplois pendant cette période d'inactivité. Des contrats hors saison, dans la restauration collective par exemple, pourront être ainsi proposés à ceux qui travaillent l'été dans les restaurants. Des réunions d'informations seront menées à titre expérimental à la fin de la saison estivale 2023 dans les quinze territoires touristiques les plus touchés par les tensions de recrutement. Elles pourraient être généralisées à partir de 2024 sur tout le territoire.

Les guichets saisonniers, physiques ou dématérialisés, seront démultipliés : il en existait 57 à l'été 2022, le gouvernement en prévoit une centaine.