Dossier

Comment adopter une communication plus responsable ?

L’image du bonheur et de la réussite avec laquelle nous avons grandi ne rime pas toujours avec sobriété. D’autres modèles doivent émerger. Qui mieux que les communicants pour donner envie de s’y projeter ? À condition d’être cohérents.


Adopter une communication plus responsable ne se limite pas à réduire l’empreinte environnementale de ses publicités, événements, magazines et sites web. Cela compte, bien sûr, de choisir le bon papier pour ses imprimés, le bon encrage pour ses packagings, de limiter les déplacements en avion des participants à un salon, ou encore de ne pas alourdir sa plateforme Internet avec des fonctionnalités inutiles. Mais « les communicants, qu’ils travaillent pour des entreprises ou des collectivités territoriales, en agence ou chez l’annonceur, doivent aussi réfléchir aux messages qu’ils portent, aussi bien sur le plan écologique que social et sociétal », précise Valérie Martin, chef du service Mobilisation citoyenne et Médias à ­l’ADEME. Le greenwashing, tout comme le pinkwashing ou le rainbow-washing, ne passent plus : les tentatives de masquer l’impact de son cœur d’activité par des discours en faveur de l’environnement, des femmes ou des minorités sont de plus en plus souvent dénoncées.
« Quand on s’engage, il est important d’être sincère, humble et transparent, de ne pas exagérer l’ampleur de ses actions et, surtout, de faire ce qu’on dit, prévient Mathieu Jahnich, consultant-chercheur, spécialiste de la lutte contre le greenwashing. Sans quoi, les citoyens s’en rendent compte et perdent confiance. » Cela nuit aussi à l’attractivité de la marque en tant qu’employeur, alors que de plus en plus de salariés cherchent aujourd’hui à aligner leur travail avec leurs valeurs.

Lutte contre les stéréotypes

La réglementation vise elle-même à limiter les pratiques commerciales trompeuses. Dans le cadre de la loi Climat et Résilience, il ne sera plus possible, à compter du 1er janvier 2023, d’apposer sur un bien ou un service l’allégation « neutre en carbone » (ou une expression équivalente) sans rendre publics notamment un bilan des émissions de gaz à effet de serre liées à l’ensemble de son cycle de vie ainsi qu’une trajectoire de réduction de ces émissions. Les entreprises soumises à l’affichage environnemental (dans l’automobile, l’électroménager…) doivent par ailleurs se déclarer sur une plateforme dédiée, publicite-responsable.ecologie.gouv.fr. Se faisant, elles choisissent de signer, ou non, un « contrat-climat » qui les engage à moins communiquer sur leurs produits les plus polluants.
« Si la lutte contre le greenwashing est ­évidente, certains freins à la transition ­écologique sont plus discrets, ajoute ­Mathieu Jahnich. La mise en scène d’un produit peut inconsciemment véhiculer des stéréotypes : un lagon pour évoquer les vacances, de la viande pour montrer une table ­conviviale, une grosse voiture pour suggérer la réussite… Cela contribue à faire croire que le bonheur passe par là. » L’ajout d’une fonctionnalité sur un site web peut, quant à lui, créer une discrimination involontaire, en le rendant moins accessible aux personnes malvoyantes ou mal connectées. « Éco-socio-concevoir une campagne ou un outil de communication ne signifie pas être moins qualitatif ou moins performant, précise Valérie Martin. Au contraire ! Nous sommes aujourd’hui submergés d’informations et de publicités. Seule une campagne créative peut impacter et convaincre le public que d’autres modèles, plus sobres et inclusifs, sont possibles et désirables. » Mais attention : l’appel au changement d’une entreprise ou d’un territoire ne sera audible que s’il s’accompagne de preuves sur ses propres efforts en faveur de la transition écologique.

Dialogue avec les parties prenantes

« Les communicants ne peuvent pas à eux seuls changer une organisation de l’intérieur, reconnaît Valérie Martin. Mais ils peuvent participer activement à cette transformation. Ils peuvent l’impulser, en trouvant les arguments pour convaincre les dirigeants, puis la faire vivre en travaillant en synergie avec les autres directions (marketing, RSE ou achats notamment). Surtout, ils doivent en faire la pédagogie auprès des collaborateurs, partenaires, fournisseurs, clients… Il y a un vrai enjeu de formation pour donner aux communicants les compétences nécessaires à ce nouveau rôle d’influence. » Ainsi, quand la Camif a choisi en 2009 de miser sur le local et l’économie circulaire, il lui a fallu aider ses fournisseurs à monter une filière de fabrication de meubles écoconçus en France, et convaincre les collectivités d’accueillir leurs usines. Ces efforts ont fini par payer : l’entreprise est sortie de la faillite, son chiffre d’affaires dépassait 45 millions d’euros en 2021, et chacune de ses embauches correspond à 14 autres emplois créés dans les territoires. Commown, coopérative de location de smartphones et ordinateurs responsables, a choisi de communiquer sur l’impact des équipements électroniques pour inciter les citoyens à privilégier des marques de produits écoconçus (Fairphone, PC Vert…) et à entrer dans une nouvelle logique basée sur le partage.
En somme, adopter une communication plus responsable, c’est se poser les bonnes questions : se demander comment accompagner efficacement la transformation écologique de son organisation et comment aider les citoyens à opérer leur propre transition.

Les 4 piliers d’une communication responsable

Plus sensible aux enjeux écologiques, davantage à l’écoute des habitants de notre planète et consciente de l’urgence, la communication responsable s’interroge autant sur les contenus que sur la manière de les délivrer. Elle repose sur 4 piliers :
• les messages responsables,
• l’éco-socio-conception des actions,
• le dialogue avec les parties prenantes,
• l’efficacité et l’éthique des affaires.
Avec une nécessaire cohérence et un respect des ordres de grandeur.

Nouveau guide pour une communication responsable

L’ADEME vient de rendre publique l’édition 2022 de son Guide de la communication responsable et du site web qui lui est rattaché. Quelle différence avec l’édition précédente ? Davantage d’outils concrets, de conseils et de partages d’expériences, pour aider les différents métiers du secteur (marketing et publicité, édition, numérique, événementiel, audiovisuel…) à participer à la transition écologique, qu’ils interviennent dans le public ou le privé.

Plus d’infos : https://communication-responsable.ademe.fr/

Pour des agences engagées

L’Association des agences-conseils en communication (AACC) a développé avec le cabinet EY, et en partenariat avec l’ADEME, un référentiel de calcul carbone et un guide qu’elle met à disposition de ses adhérents, pour les aider à mesurer leur impact et à l’améliorer.

Plus d’infos : https://www.aacc.fr/