«Tout bachelier a droit à une place à l’université.» Ce principe bien connu dans l’enseignement vaut pour le premier cycle d’étude supérieur: la licence. Mais qu’en est-il de la poursuite d’études? Du 23 juin au 21 juillet, les élèves de licence reçoivent leurs réponses d’admission sur Mon Master, une plateforme, lancée en 2023, pour centraliser les candidatures destinées à 8000 formations de second cycle. Comme chaque année, de nombreux élèves se plaignent de ne pas avoir de place. Dans certains domaines, comme le droit par exemple, les universités croulent sous les candidatures et pratiquent une forte sélection. Alors existe-t-il réellement un droit à la poursuite d’études en France?

Les étudiants recalés peuvent saisir le rectorat

En théorie, ce droit a été consacré par un décret en 2021. Depuis lors, l’État oblige les rectorats à proposer des masters aux étudiants titulaires d’une licence qui n’ont pas trouvé de formation. Selon Maître Valérie Piau, ces candidats peuvent ainsi engager un recours si aucune place ne leur est finalement accordée. «Ils sont en droit de saisir le juge administratif pour exiger ce qu’ils n’ont pas obtenu et/ou des dommages et/ou intérêts», détaille ainsi l’avocate spécialiste en droit de l’éducation. Pour saisir le rectorat plusieurs conditions doivent être réunies. Parmi celles-ci, on retrouve l’obligation d’avoir postulé dans au moins deux établissements d’enseignement supérieur et d’avoir choisi au moins deux mentions de master différentes.

Le nombre de place en master n’est pas infini

Selon le ministère de l’éducation nationale, 4281 demandes recevables ont été transmises par les recteurs aux universités l’année dernière. Et sur ces dernières, 2638 ont trouvé une issue favorable. Le nombre de places en master n’est pas infini. «L’année dernière, nous avons reçu pas loin d’un millier de demandes issues du rectorat et nous n’avons pu formuler qu’une douzaine de propositions aux candidats. À la fin, une seule personne l’a acceptée», rapporte Olivier Oudar, le vice-président de l’université Paris 13. «Peut-être que dans d’autres universités, beaucoup plus d’étudiants sont pris mais ce n’est pas le cas ici.» détaille le responsable formation et vie universitaire de Paris 13. «Lorsque les demandes arrivent nous essayons de trouver la mention de masters la plus proche de celle demandée par l’étudiant, mais si nous n’avons plus de places, nous devons répondre que nos capacités sont atteintes», poursuit le responsable formation et vie universitaire de Paris 13.

Quand un élève a obtenu sa licence par compensation avec 10 de moyenne, on peut avoir des doutes sur sa capacité à répondre aux exigences d’un master 

Olivier Oudar, vice-président de l’Université Paris 13

De plus, selon Olivier Oudar, le niveau des étudiants qui saisissent le rectorat est rarement suffisant. «Souvent, si ces dossiers ont été refusés c’est parce qu’ils ne sont pas bons. Quand un élève a obtenu sa licence par compensation avec 10 de moyenne, on peut avoir des doutes sur sa capacité à répondre aux exigences d’un master» explique le vice-président de Paris 13.

Sans remettre en cause le principe des saisines rectorales, Guillaume Gellé, président de France université questionne lui aussi l’intérêt de proposer un master à tous les étudiants. «Il faut arrêter de faire croire que tout le monde aura sa place en master. Cette formation reste assez pointue et exigeante, tout le monde ne peut pas y accéder», argue ainsi le président de l’université Reims Champagne. Et d’ajouter: «C’est donc normal qu’il y ait une sélection, quitte à ce que cela en déçoive certains. Nous tenons à ce que l’insertion professionnelle à l’issue de nos masters, dont nous sommes très fiers, ne soit pas dégradée par une baisse de la sélectivité».

Le ministère mise sur une baisse des recours

Le ministère de l’enseignement supérieur espère qu’il y aura moins de recours à l’avenir. Déjà en 2022, les demandes au rectorat avaient diminué de 29% par rapport à 2021. Cette avancée avait notamment été permise par l’alignement des calendriers. Les années précédentes, en effet, chacune des universités avait des dates de candidature et d’annonce des résultats différentes. Et puis, le site Mon Master devrait fluidifier le système puisque désormais les candidats, en acceptant une formation, se désistent automatiquement des autres. «Auparavant, les élèves qui oubliaient de se désister pouvaient bloquer des places jusqu’au jour de la rentrée», précise le ministère.