Enseignement supérieur : le « maquis » des formations privées pointé du doigt
Face à des établissements qui « jouent l'ambiguïté », la médiatrice de l'Education demande des clarifications pour sécuriser le parcours des étudiants. Les réclamations ont explosé depuis 2017.
Par Ange Torlotting
« Que les étudiants puissent s'inscrire dans les enseignements supérieurs privés les yeux ouverts » : tel est l'objectif formulé en conférence de presse ce mercredi par Catherine Becchetti-Bizot, médiatrice de l'Education nationale et de l'Enseignement supérieur, à l'occasion de la présentation de son rapport annuel. Car en 2022, le nombre de saisines émanant d'étudiants du secteur privé de l'éducation a atteint un pic avec 1.392 réclamations, soit une augmentation de 346 % depuis 2017, selon ce document. Une majeure partie d'entre elles concernent l'enseignement supérieur privé.
Entre labels, visas, certifications, l'appellation « reconnus par l'Etat », les étudiants ont rapidement tendance à se perdre dans le choix de leur établissement futur. « Un certain nombre d'établissements jouent des appellations et d'une certaine ambiguïté qui peut créer la confusion », explique la médiatrice. « Il s'agit d'un réel maquis : de nombreuses familles font face à un nombre très important d'établissements, de formations, de diplômes et de régimes juridiques enchevêtrés », ajoute-t-elle.
L'illisible label « reconnu par l'Etat »
Plus souvent en difficulté, les étudiants ont aussi été plus nombreux à avoir recours à la médiation pour régler leurs problèmes. Ces saisines se concentrent notamment sur la reconnaissance ou non par l'Etat d'un diplôme et le remboursement de frais d'inscription ou de scolarité.
Aussi, l'habilitation d'un établissement à recevoir des boursiers revient régulièrement, étant donné les prix bien souvent onéreux de ces écoles privées. Enfin, le rapport pointe des blocages administratifs récurrents, en particulier dans la récupération d'un diplôme lorsque l'établissement a fermé au cours de l'année.
Lire aussi :
Des pistes pour lutter contre la pénurie d'enseignants
Education : une « flambée » des réclamations liées aux examens et concours
Dans le méli-mélo des appellations, la « reconnaissance par l'Etat » des certificats et diplômes pose particulièrement question. L'expression usuelle a effectivement tendance à induire les étudiants en erreur. « En France, le Code de l'éducation est assez libre, indique-t-on au ministère de l'Education. Quand l'Administration ne s'oppose pas à l'ouverture d'un établissement, ce dernier peut avoir tendance à se considérer comme reconnu par l'Etat. »
Certains de ces établissements, soi-disant reconnus par l'Etat, sont parfois loin de tenir leurs promesses. « Certains requérants ont eu la mauvaise surprise de constater que le diplôme obtenu ne leur permettait pas d'emprunter la voie choisie à l'issue d'un cursus parfois long et coûteux », indique le rapport.
Améliorer la lisibilité des diplômes
Forte de ces constatations, la médiatrice a formulé une série de recommandations pour y remédier. Elle demande à « veiller à ce que l'ensemble de ces établissements respectent les règles fixées par le Code de l'éducation en matière de publicité », notamment par le biais de signalement aux services en charge de la répression des fraudes.
En ce qui concerne la lisibilité quant à la valeur des diplômes, la médiatrice préconise de « rassembler, unifier, simplifier et rendre davantage visible et lisible, les informations relatives à la nature des diplômes, notamment sur la FAQ Parcoursup ».
Enfin, afin d'améliorer et faciliter le recours à la médiation, Catherine Becchetti-Bizot se place en faveur d'un rappel, pour les établissements d'enseignement supérieur privé, de « l'obligation faite par le Code de la consommation de mentionner sur leur site et dans les contrats les coordonnées d'un médiateur dédié ». Une mesure qui pourrait participer au développement de la médiation, en progression constante depuis dix ans en ce qui concerne le nombre de saisines.
Ange Torlotting