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Qu'est-ce qu'être jeune aujourd'hui ?

Temps de lecture  18 minutes

Par : Olivier Galland - Sociologue, directeur de recherche émérite au CNRS

Si la jeunesse d'aujourd'hui se distingue de celle des générations précédentes, l'idée d'une rupture générationnelle entre les jeunes et leurs aînés est à nuancer, au regard du passé. En revanche, elle semble plus clivée socialement, un problème qui révèle la nécessité d'une réforme du système éducatif français, peinant à pallier les inégalités.

La jeunesse, un concept jeune

À quand remonte la conception de la jeunesse comme une période spécifique de l'existence ?

On connaît les célèbres travaux de Philippe Ariès sur l'invention de l'enfance. Ce dernier montrait que l'enfance était ignorée dans la France d'avant les Lumières (Philippe Ariès, L'Enfant et la Vie familiale sous l'Ancien Régime, Plon 1960, réédition Points, 2014). Avant le XVIIIe siècle, la mortalité infantile y était très élevée, ce qui contribuait à nourrir une certaine indifférence à l'égard des enfants. Comme ils étaient nombreux à mourir jeunes, ceux-ci étaient facilement "remplacés". Peu ou prou, on peut étendre le raisonnement à la jeunesse. Avant le siècle des Lumières, la jeunesse n'avait pas véritablement d'existence sociale ou au moins de reconnaissance sociale. C'était l'âge de l'attente, comme l'a montré l'historien Georges Duby à propos des jeunes de familles nobles au Moyen Âge (Georges Duby, Hommes et Structures du Moyen Âge, Tome 1 : La Société chevaleresque, réédition Flammarion, 2009). En effet, pour exister socialement, les garçons (car le destin des filles dépendait uniquement du mariage) devaient attendre que les pères cèdent la place. Par ailleurs, prévalait en France le droit romain, la patria potestas (le pouvoir paternel), qui donnait aux pères un pouvoir absolu sur leur progéniture.

Les Lumières ont changé la donne, car elles ont introduit l'idée que l'obtention d'un statut ne passait plus uniquement par le sang mais que ledit statut pouvait s'acquérir par le mérite et l'éducation. La réalisation personnelle commençait à sortir d'un strict déterminisme héréditaire. Elle pouvait se construire par des efforts et des talents personnels. Sur ce plan, l'Émile de Jean-Jacques Rousseau est un livre fondateur, qui exalte ce rôle de l'éducation dans la construction de soi.

Par la suite, progressivement, l'éducation extrafamiliale, à l'école puis à l'université, s'est étendue et peu à peu généralisée. Celle-ci a puissamment contribué à construire la jeunesse comme un âge de la vie, en créant des grades scolaires et en institutionnalisant ainsi cette période de l'existence.

Lorsque l'on évoque la jeunesse, de quelle tranche d'âge parle-t-on au juste ? N'y a-t-il pas une extension de cette période de la vie ?

Oui, il y a une extension par les deux bouts. La jeunesse est devenue à la fois plus précoce et plus tardive. Elle est plus précoce parce que les préadolescents, c'est-à-dire les collégiens, ont acquis une nouvelle autonomie qui contribue à les différencier de l'enfance au sens strict. À ce sujet, les nouveaux moyens de communication ont joué un grand rôle dans cette prise d'autonomie des préados. C'est une nouvelle autonomie relationnelle : ceux-ci ne dépendent plus de leurs parents pour nouer et entretenir des contacts avec leurs proches. Plus globalement, les réseaux sociaux construisent une scène sociale spécifique à l'adolescence, à laquelle les adultes n'ont pas accès. Ces réseaux contribuent aussi évidemment à forger et à cristalliser des goûts spécifiques à cet âge de la vie.

Mais la durée de la jeunesse s'est aussi allongée ; sa fin est plus tardive, du fait de la prolongation des études, du recul de l'âge de la stabilisation professionnelle et surtout du recul de l'âge de la formation d'une famille. Aujourd'hui, les femmes ont leur premier enfant, en moyenne, vers 29 ans. Or il me semble que la naissance du premier enfant clôt véritablement la phase de jeunesse, parce que l'on s'engage alors dans des responsabilités irréversibles qui changent assez profondément notre mode de vie. Les enquêtes sur les emplois du temps de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) le montrent bien : après la naissance du premier enfant, l'emploi du temps se recentre sur le foyer ; le temps consacré, par exemple, aux sorties entre amis diminue fortement. C'est un peu la fin de la sociabilité du juvénile, dans sa phase la plus extensive tout au moins (Olivier Galland, Sociologie de la jeunesse, Armand Colin, 7e édition 2022, p. 250).

Quelles sont les particularités de la jeunesse d'aujourd'hui ?

Qu'est-ce qui distingue, selon vous, la génération des 18-24 ans de ceux qui ont eu le même âge dans les années 1980 ou 1990 ?

C'est une question complexe, parce que la société dans son ensemble évolue, et se posent aujourd'hui des questions que l'on ne se posait pas hier. Mais celles-ci étaient-elles pour autant absentes de la tête des gens ? En toute rigueur, il est difficile d'y répondre. Par exemple, en 1980, on ne parlait, pour ainsi dire, pas des violences exercées par les hommes sur les femmes. Cela veut-il dire pour autant qu'on les tolérait plus qu'aujourd'hui ? Sans doute en partie, mais il n'y a pas de réponse scientifique à cette question, tout simplement parce que, à l'époque, ce genre de question n'était pas posé dans les enquêtes !

Pour en revenir aux jeunes, je pense que l'on a tendance à exagérer l'impact des ruptures générationnelles, depuis la fin des années 1960. Les années 1960 ont bien été une période de "clash" générationnel sur le plan des valeurs et des mœurs. Mais, par la suite, on a plutôt constaté une évolution tendancielle, sans véritable rupture prononcée. La société française a évolué tendanciellement – les jeunes plus que les autres générations, mais ces dernières également – vers une acceptation de plus en plus prononcée du libéralisme culturel, c'est-à-dire de l'idée que chacun doit être libre de concevoir, sur tous les plans, sa vie personnelle comme il l'entend. Un exemple emblématique de cette tendance profonde est la tolérance grandissante de toutes les générations (à l'exception peut-être des plus âgées, les générations d'avant-guerre, qui n'ont pas grandi dans le même contexte social) à l'égard de l'homosexualité.

La jeunesse actuelle est à la fois plus homogène et plus clivée que celle des années 1980. Elle est plus homogène sur le plan culturel du fait de la progression spectaculaire de la scolarisation (80 % d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat, 50% poursuivant des études supérieures). Cette prolongation de la scolarisation contribue à "extraire" plus longtemps les jeunes de leur milieu d'origine et à les inclure plus longtemps dans l'univers culturel de leur génération. Ils s'y créent des goûts communs. Mais cette jeunesse est également plus clivée, socialement cette fois. En effet, on constate que les jeunes qui poursuivent des études et obtiennent un diplôme universitaire ou une qualification professionnelle (la majorité) ont plus de chances de réussite et d'intégration que ceux qui sortent de l'école sans diplôme ou avec seulement une faible qualification. Ces derniers ont de plus en plus de mal à trouver un emploi et à se stabiliser dans ce dernier, surtout les garçons, du fait des destructions massives d'emplois non qualifiés dans les secteurs industriels qui les employaient autrefois.

La jeunesse d'origine immigrée, surtout celle de confession musulmane, a également connu d'assez profondes mutations culturelles. Dans les années 1990, on était optimiste quant à ce que l'on pourrait appeler "l'intégration culturelle des jeunes d'origine étrangère" : leurs goûts, leurs mœurs, leurs attitudes sociales et politiques semblaient se rapprocher progressivement de ceux des jeunes d'origine française. À partir des années 2000, ce mouvement a été stoppé, voire inversé – pas pour tous les jeunes d'origine étrangère, bien sûr, mais pour une partie notable d'entre eux. La religiosité des jeunes musulmans, qui semblait diminuer (à l'image de ce qui se passait pour les autres jeunes), a connu un fort rebond (Hugues Lagrange, "Pratique religieuse et religiosité parmi les immigrés et les descendants d'immigrés du Maghreb, d'Afrique sub-saharienne et de Turquie en France", 2013) et a dérivé, pour une partie minoritaire d'entre eux, vers une forme d'intégrisme ou au moins d'absolutisme religieux. Ce mouvement les éloigne culturellement de la société française, qui, comme je l'ai dit, est de plus en plus gagnée par le libéralisme culturel. Or les jeunes musulmans les plus attachés à leur foi le rejettent assez radicalement. Cette évolution religieuse s'accompagne, chez une partie très importante des jeunes musulmans, de la conviction d'être victime d'un ostracisme racial profondément ancré dans la société française. Je ne crois pas que cette idée soit juste. En effet, les enquêtes sur les valeurs et les sentiments de xénophobie en Europe montrent que la France est l'un des pays les moins xénophobes d'Europe, les pays de l'Est l'étant bien davantage, alors que la proportion de populations étrangères représente une faible part de la population nationale (European values study, 2018). Même si, c'est indéniable, les jeunes d'origine étrangère sont victimes de discriminations à l'embauche, mais beaucoup de jeunes d'origine étrangère en sont persuadés. Ces tensions se matérialisent souvent dans les rapports très conflictuels que ces jeunes entretiennent avec la police, sans doute considérée comme le bras armé d'une société hostile.

Les jeunes ont pour la plupart vécu durement la crise sanitaire et les périodes de confinement. Les effets de cette crise sont-ils encore sensibles, selon vous ?

Oui, la crise sanitaire a profondément affecté les jeunes, autant moralement que matériellement. Je crois que l'impact moral a été le plus fort, notamment pour les étudiants, qui ont vu leurs cours interrompus et qui, pour certains, se sont trouvés confinés, isolés et privés de relations sociales.

Les enquêtes, en particulier celles que Marc Lazar et moi-même avons réalisées pour l'Institut Montaigne (Une jeunesse plurielle. Enquête auprès des 18-24 ans, rapport réalisé par Olivier Galland et Marc Lazar pour l'Institut Montaigne, février 2022), montrent que les effets de la pandémie ont été ressentis très durement, 51% des jeunes interrogés déclarant que la crise sanitaire a eu un impact négatif sur leur moral. Néanmoins, en France, la période d'interruption des cours a été relativement courte, ce qui a peut-être permis d'éviter un traumatisme plus profond. Je ne suis pas sûr que cet épisode laisse des traces durables chez les jeunes (sauf pour la minorité qui a connu les situations les plus pénibles). La vie a repris ses droits. Les enquêtes montrent que le moral des jeunes a assez vite rebondi.

Diriez-vous qu'il existe aujourd'hui chez les jeunes une difficulté à se projeter dans le monde adulte ?

La jeunesse a toujours été une période assez difficile. C'est l'âge des choix, et choisir est toujours angoissant. Cela l'est-il plus aujourd'hui qu'hier ? Ce qui a changé, c'est que, la période de jeunesse étant désormais plus longue, elle est devenue une phase de transition et de tâtonnements durant laquelle, par tentatives successives, on essaie de faire correspondre ses aspirations à un certain statut. Autrefois, ces aspirations étaient souvent héritées directement du milieu familial et, quoi qu'il en fût, même si ces aspirations étaient déçues, cette phase de transition était beaucoup plus courte.

Si la question est "Les jeunes rejettent-ils aujourd'hui le monde adulte tel qu'il leur est offert ?", je ne crois pas que ce soit le cas de la grande majorité d'entre eux. Les jeunes ont certes des aspirations sociétales, concernant l'environnement par exemple, mais ces aspirations ne conduisent pas la plupart d'entre eux à des choix radicaux. Il faut se méfier de l'effet de loupe médiatique produit par les initiatives des jeunes les plus politisés et les plus activistes. Même si les actions de ces derniers peuvent bénéficier d'une certaine sympathie, la plupart des jeunes ne seraient pas prêts à partager leurs combats dans une démarche de rupture. De récentes enquêtes (par exemple, l'enquête internationale réalisée en 2022 par IPSOS pour EDF "Observatoire international climat et politiques publiques") sur les attitudes des jeunes à l'égard du changement climatique et de l'environnement montrent que, sur le plan des actions personnelles visant à changer leur mode de vie pour l'adapter à ces conditions nouvelles, les jeunes en font plutôt moins que les autres générations, même si, en même temps, ils semblent plus disposés à manifester et à s'engager.

Le lien entre les générations est-il encore possible alors que les jeunes s'enferment de plus en plus dans leur monde ultraconnecté ?

Oui, je crois qu'il l'est et qu'il l'est même plus qu'autrefois. L'évolution des valeurs vers la reconnaissance du droit de chacun à mener sa vie personnelle comme il l'entend a conduit à un formidable rapprochement des générations. Sur le plan des mœurs et des valeurs de la vie quotidienne, les différentes générations cohabitant dans la société sont beaucoup plus proches les unes des autres que ce n'était le cas des années 1950-1960. Par ailleurs, du fait de la prolongation de la jeunesse, les parents jouent aujourd'hui un rôle d'accompagnement beaucoup plus important qu'autrefois. Les jeunes sont considérablement aidés par leurs parents, autant matériellement qu'affectivement. Ce lien contribue grandement à rassembler les générations.

La famille est plus que jamais une institution centrale. Bien sûr, l'écart culturel entre les générations s'est creusé. Les jeunes ont en partie abandonné la référence au "livre" comme marqueur culturel de leur génération, et les adultes, du moins les plus âgés d'entre eux, restent totalement étrangers à cette culture jeune dont ils ne maîtrisent aucun des codes. Mais peu à peu cette nouvelle culture numérique se transmet de génération en génération. L'évolution est irréversible. On peut espérer qu'en se diffusant cette culture numérique conserve ses meilleurs aspects – une extraordinaire interconnexion entre les individus, l'accès à un monde cosmopolite, la diffusion interplanétaire des connaissances – et perde ou atténue ses travers – la stigmatisation anonyme sur les réseaux sociaux et la diffusion d'idées fausses et complotistes.

Le problème du chômage des jeunes et de leurs qualifications

Pensez-vous que les politiques publiques tournées vers la jeunesse répondent aux besoins de cette dernière ?

La France souffre, depuis quarante ans, d'un handicap structurel : le taux de chômage des jeunes, nettement supérieur à la moyenne européenne (15,1% en 2022), qui oscille entre 20% et 30% selon les années (alors qu'il ne dépasse pas 6% en Allemagne).

Deux facteurs contribuent à ce "surchômage" : l'organisation du marché du travail et le déficit du système de formation initiale. Le marché du travail français est organisé de telle sorte que la flexibilité de l'emploi concerne presque exclusivement les jeunes, alors que les actifs dans la force de l'âge en sont presque totalement préservés. Bien sûr, l'actualité est souvent émaillée de gros titres sur des licenciements collectifs et des fermetures d'usines qui touchent des travailleurs plus âgés. Mais, en réalité, ces suppressions collectives d'emplois ne constituent qu'une part très minime du flux des nouveaux chômeurs. Ce sont surtout les jeunes occupant des emplois temporaires (essentiellement des contrats à durée déterminée, CDD) qui sont le plus massivement concernés par ce chômage. Il s'agit d'un phénomène qui n'a pas beaucoup de visibilité médiatique et politique, et qui est donc largement ignoré de l'opinion. Les différents plans en faveur de l'emploi des jeunes qui se sont succédé depuis le premier, celui de Raymond Barre en 1977, n'ont pas réussi à réduire de manière durable le taux de chômage des moins de 25 ans, même si celui-ci est passé sous la barre de 20% depuis 2020. Ce taux reste néanmoins supérieur à la moyenne européenne.

Le second facteur tient aux difficultés qu'a eues le système scolaire pour s'adapter à la massification de l'accès aux études secondaires. Fondamentalement, la culture du système scolaire français reste assez élitiste. En théorie, ce fameux "élitisme républicain" est un gage d'équité, chacun devant être reconnu selon ses mérites scolaires. Mais, dans la réalité, cet élitisme contribue assez largement à reproduire les inégalités de départ, en mettant l'accent sur la sélection des meilleurs, au détriment de la réussite des plus faibles. Pendant trop longtemps, on s'est accommodé de cette situation, en cherchant simplement à compenser a posteriori les effets néfastes de ce système éducatif, par exemple par une politique de stages (les "emplois d'avenir", par exemple, sous François Hollande) et d'indemnités. Il faut prendre le problème à la racine pour que l'école accorde à chaque jeune un bagage culturel et un niveau de qualification qui lui permettent de commencer sa vie d'adulte avec des chances raisonnables de réussite et d'intégration. Il me semble que l'équipe gouvernementale actuelle a compris cela en mettant l'accent sur l'acquisition, dès le début de la scolarité, des savoirs fondamentaux et en instaurant une politique de dédoublement des classes dans les zones les plus défavorisées. Mais il reste certainement beaucoup à faire. Je pense que le système scolaire français devrait gagner en souplesse, en laissant davantage de liberté et de marge de manœuvre aux établissements afin qu'ils puissent s'adapter à la diversité des publics dont ils ont la charge.

On constate également un certain nombre de problèmes liés à l'orientation scolaire, surtout à la fin de la troisième, au moment où les jeunes doivent choisir entre la voie professionnelle et la voie générale. Théoriquement, cette orientation est choisie, mais beaucoup de jeunes, surtout ceux qui sont orientés vers la voie professionnelle, la ressentent comme subie. Les spécialités de la voie professionnelle sont à la fois trop nombreuses et trop étroites. Au niveau local, peu de spécialités sont disponibles et les jeunes sont donc souvent contraints d'accepter, par défaut, une spécialité qui ne correspond pas à leurs vœux, conduisant beaucoup d'entre eux à l'échec. À l'image de ce qui se pratique dans les pays du Nord, il faudrait proposer des formations professionnelles à spectre beaucoup plus large afin de permettre aux jeunes de construire plus progressivement leurs choix.

La jeunesse vous semble-t-elle mieux ou plus mal lotie en France que dans les autres pays européens ?

Comme je l'ai dit, les jeunes Français souffrent d'un grand handicap, celui du chômage, plus élevé que chez leurs homologues européens (sauf en Espagne et en Italie, où le taux de chômage des jeunes tourne autour de 30%). Toutefois, le tableau de la jeunesse française n'est pas homogène. On y observe en effet un mouvement de polarisation sociale : les destins sociaux des jeunes divergent de plus en plus, selon notamment le niveau de diplôme.

Les enquêtes de suivi de sortants du système de formation initiale menées par le Centre d'études et de recherches sur les qualifications (Cereq) le montrent bien : les diplômés, dans l'ensemble, ne s'en sortent pas si mal, et maintiennent leur position, alors que la situation des non-diplômés ou faiblement diplômés se dégrade d'année en année. Il n'y a donc pas, comme on l'entend parfois, de "génération sacrifiée", mais bien en revanche une situation de plus en plus problématique pour les jeunes peu qualifiés. Là encore, une réforme en profondeur du système scolaire serait la clef, notamment à l'étape du lycée professionnel. Cette réforme est, semble-t-il, inscrite à l'agenda politique. Il faut espérer que celle-ci puisse aboutir, afin d'atteindre 100 % de jeunes qualifiés, ce qui devrait être l'objectif d'une nation prospère comme la France.

Au niveau des études supérieures, des réformes sont également nécessaires. En effet, de nombreux jeunes sont déçus, à l'issue de Parcoursup, de n'avoir pu accéder à l'orientation qu'ils avaient choisie. C'est le cas notamment de lycéens titulaires du bac professionnel, du fait du nombre insuffisant de places en section de technicien supérieur (STS), préparant au BTS. De la même manière, des titulaires du bac technologique ont souvent du mal à intégrer un institut universitaire de technologie (IUT), où ils sont concurrencés par des titulaires du bac général. Il faudrait élargir la gamme des formations professionnelles courtes dans le supérieur, d'autant que les enquêtes de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)  montrent que la France manque de cadres techniques de niveau intermédiaire et souffre d'un déficit de compétences (OCDE, Obtenir les bonnes compétences : France, 2017). Dans ce document, l'OCDE note que la France affiche l'un des niveaux de sous-qualification les plus élevés de l'OCDE. La France connaît un certain degré de pénurie pour la majorité des compétences, les plus marquées concernant l'éducation, l'ingénierie et la technologie.

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