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Ecoles de commerce : hausse spectaculaire des frais de scolarité

Depuis 2011, le coût d'un programme « grande école » en business school a été multiplié par 1,7, selon une enquête de Planète Grandes Ecoles et Mister Prépa. Une hausse qui s'explique par des investissements toujours plus importants. Reste que sur la période, les salaires de sortie ne suivent pas la même tendance.

Le programme grande école de HEC Paris coûte 61.700 euros aux étudiants.
Le programme grande école de HEC Paris coûte 61.700 euros aux étudiants. (Denis Allard / REA)

Par Florent Vairet

Publié le 28 août 2023 à 15:58Mis à jour le 28 août 2023 à 19:39

Pas de doute, les étudiants d'école de commerce saisissent la notion d'inflation. Les frais de scolarité ont augmenté de 68 % entre 2011 et 2023, soit une hausse de 3 % par an. Les sommes en jeu sont loin d'être petites. Le coût moyen pour un programme « grande école » (trois ans, sans compter l'éventuelle année de césure), celui suivi par les élèves issus de classes préparatoires, est désormais de 43.358 euros, selon les chiffres rassemblés par les sites Planète Grandes Ecoles et Mister Prépa, +5,9 % sur un an.

Quelles sont les écoles les plus onéreuses ? HEC ne trône pas seulement en haut des classements académiques, elle ravit aussi la première place des écoles les plus chères. Le coût total pour les trois années du programme est de 61.700 euros (+73 % depuis 2011).

Sur les douze années étudiées, les hausses les plus fortes ont été décidées par l'Essec et Audencia (+86 % chacune). Enfin pas tout à fait. L'Institut Mines-Télécom Business School a fait grimper ses frais de scolarité de… 224 %. Toutefois, après cette hausse à trois chiffres, l'école fait toujours figure d'école de commerce post-prépa la moins chère du marché avec des frais de scolarité de 24.350 euros. A cela, une explication : l'école ayant un statut public, a toujours affiché des tarifs beaucoup plus faibles.

Les raisons de ces hausses spectaculaires

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Qu'est-ce qui justifie l'envolée des frais de scolarité ? Tout d'abord, évacuons une idée reçue largement répandue : les écoles de commerce se gaveraient sur le dos des étudiants. La majorité des écoles sont constituées en association de loi 1901, leur interdisant de partager les bénéfices. D'autre part, interrogées par Les Echos START, plusieurs écoles affirment ne faire aucun bénéfice sur le programme « grande école » dont le dispositif coûte plus qu'il ne rapporte. Elles gagnent en revanche de l'argent sur les autres formations, type bachelor et executive master.

Ces hausses importantes s'expliquent en réalité par plusieurs facteurs. Les écoles se sont lancées ces dernières années dans des investissements importants, que ce soit les dispositifs digitaux pour répondre au besoin de distanciel, ou la rénovation voire l'acquisition de nouveaux campus. Citons l'exemple de l'emlyon qui a déboursé plus de 100 millions d'euros pour son nouveau campus situé en centre-ville. HEC Paris s'apprête également à engager une importante rénovation de son campus historique de Jouy-en-Josas. Objectif pour les écoles : rester attractives aux yeux des étudiants français mais surtout internationaux qui viennent gonfler leurs rangs.

Par ailleurs, dans cette course au classement, les écoles de commerce n'ont pas d'autres choix que d'obtenir la triple accréditation (AACSB, AMBA et EQUIS) si elles veulent asseoir leur légitimité. Mais cela présente un coût important d'homologation pour les 19 écoles françaises qui peuvent se targuer d'être triplement couronnées.

Autre élément qui explique la hausse des frais de scolarité : l'Etat, via les chambres de commerce et d'industrie, s'est sur la dernière décennie, désengagé du financement des écoles de commerce, les obligeant à trouver de nouvelles recettes.

Des écoles françaises reconnues, et toujours bien moins chères que les américaines

Désormais, les 6 écoles les plus classées (HEC, Essec, ESCP, Edhec, emlyon et Skema) affichent toutes un tarif supérieur à 50.000 euros. Si ces montants peuvent paraître exorbitants, il faut savoir que les écoles de commerce françaises sont chaque année distinguées dans les classements internationaux. A ce titre, il est intéressant de comparer ces prix à ceux pratiqués par les excellentes universités américaines. Un MBA à Harvard coûte 75.000 dollars (69.000 euros), et 70.000 dollars (65.000 euros) à Berkeley. Et ces formations durent un an… quand le programme « grande école » s'étale sur trois ans.

Est-ce à dire que les montants français sont justifiés ? Un jugement difficile à émettre tant la France a une tradition de (quasi) gratuité de son enseignement supérieur. D'autre part, s'ajoute à cela des ressentis nuancés de la part d'étudiants. Des voix s'interrogent chaque année sur ces montants au regard de la qualité parfois discutable des cours en école de commerce.

Mais si l'on regarde la chose de manière plus pragmatique, l'investissement semble valoir le coup. Les grandes écoles permettent à leurs étudiants d'obtenir à la sortie des salaires considérables. Selon l'enquête 2023 de la Conférence des grandes écoles, les jeunes diplômés d'écoles de commerce signent en moyenne un premier salaire brut annuel autour de 39.000 euros.

Cependant, l'enquête de Planète Grandes Ecoles relève que les salaires n'ont pas suivi la courbe des frais de scolarité : sur les 12 dernières années, les frais de scolarité des écoles de commerce ont augmenté deux fois plus vite que les salaires de leurs étudiants.

Des aides existent

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Ceci étant dit, tout cela ne décourage pas les inscriptions. Les écoles les plus chères, qui sont les mieux classées, remplissent chaque année leur promotion. Ce qui n'est pas le cas des écoles les moins chères (et moins bien classées). Seules 15 % des places ouvertes au concours de l'EM Normandie ou de Brest Business School ont trouvé preneur. Même IMT-BS, la moins chère des écoles, n'a rempli ses rangs qu'à hauteur de 34 % pour cette rentrée 2023. Les étudiants leur préfèrent d'autres écoles ou d'autres formations notamment universitaires.

A noter que pour compenser leur hausse de tarifs, les écoles ont développé des aides pour les étudiants issus de familles les plus modestes. HEC offre tout ou une partie de la scolarité aux étudiants boursiers du Crous. De même à l'Edhec, la réduction est de 20 % à 75 % en fonction de l'échelon. D'autres les conditionnent aux résultats, comme l'EM Normandie qui octroie une baisse allant jusqu'à 30 % pour un étudiant boursier ayant obtenu lors de son année précédente au sein de l'école une moyenne supérieure à 14/20.

Florent Vairet

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