François Bayrou : « La laïcité fait partie du patrimoine vivant de la France »
Invité ce dimanche du Grand Rendez-vous, l'émission politique d'Europe 1 en partenariat avec CNews et « Les Echos », le Haut-commissaire au plan espère que la mise en application de l'interdiction de l'abaya à l'école va bien se passer. Il ne croit pas que « la présence de l'islam en France soit profondément agressive ».
Par Chantal Houzelle
L'interdiction du port de l'abaya à l'école au nom de la laïcité, qui a fait couler beaucoup d'encre depuis l'annonce faite le 27 août par le nouveau ministre de l'Education nationale, Gabriel Attal , est un marqueur politique de la rentrée scolaire 2023-2024. Invité ce dimanche du Grand Rendez-vous, l'émission politique d'Europe 1 en partenariat avec CNews et « Les Echos », François Bayrou espère que sa mise en application va bien se passer.
« Il faut comprendre que le nombre de ces vêtements [religieux, NDLR] est inférieur de moitié au nombre de voiles qu'il y avait quand j'étais ministre de l'Education nationale [de mars 1993 à juin 1997, NDLR], et nous avons réussi à cette époque-là, en passant par des médiatrices », a relativisé le Haut-commissaire au plan. « Je ne suis pas certain que l'abaya soit si profondément enracinée dans ces communautés-là. Je pense que l'immense majorité des familles est acquise à l'idée que l'école est trop précieuse pour qu'on aille perturber la scolarité des élèves. »
« Il ne faut pas faire de ségrégation »
Selon le président du Modem, la France n'est pas seulement un pays régi par des règlements et des lois, « c'est aussi une manière de vivre, et la laïcité fait partie de ce patrimoine vivant. C'est légitime de défendre et de transmettre ce patrimoine moral et ses coutumes, il faut s'y intégrer ». Plus généralement, le maire de Pau ne croit pas que « la présence de l'islam en France soit profondément agressive », estimant que « 90 % des musulmans français sont bien intégrés dans la société française ».
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Interrogé sur le port de l'uniforme à l'école susceptible de résoudre ce problème identitaire, François Bayrou a émis des réserves. « On peut l'envisager, il n'y en a jamais eu en France. Il y avait la blouse grise pour les garçons et rose ou bleue pour les filles », s'est-il remémoré. « Les établissements peuvent demander à avoir l'uniforme mais, si on le fait, il faut ouvrir cette perspective partout, il ne faut pas faire de ségrégation, a-t-il alerté. Nous n'y arriverons pas, si nous présentons les choses comme perpétuellement exacerbées. »
A l'instar de la France Insoumise qui a annoncé son intention de saisir le Conseil d'Etat pour attaquer la décision du gouvernement d'interdire l'abaya. « Je pense qu'une partie de la gauche est obsédée par l'idée que c'est dans ces quartiers [prioritaires, NDLR] qu'elle va trouver sa réserve électorale, mais je suis persuadé qu'elle se trompe. »
« On est entré dans une démarche inédite »
Présent aux « Rencontres de Saint-Denis », organisées à huis clos à l'initiative d'Emmanuel Macron le 30 août, auxquelles ont participé onze chefs de partis, le Haut-commissaire au plan a qualifié cet événement d'inédit dans l'histoire de la politique française. « On est entré dans une démarche inédite, tout le monde a participé à cet échange sur les institutions, les référendums ou la politique étrangère avec de longs moments incroyables, comme sur l'Ukraine », a rapporté François Bayrou.
« On n'a rien décidé, mais c'est un très grand progrès. On est entré de plain-pied dans la question centrale de la gestion du pluralisme. Le bipartisme est mort et enterré en France ». Le président du Modem considère que « la société française, comme toutes les autres sociétés occidentales, est en perte de repères ».
Chantal Houzelle