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Décryptage

Les universités sommées de faire le tri dans leurs formations

Fermer les formations universitaires qui ne collent pas assez aux besoins économiques du pays, développer des indicateurs à cet effet, couper dans les budgets : la feuille de route de rentrée de la ministre de l'Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, a des allures de douche froide.

Sylvie Retailleau, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.
Sylvie Retailleau, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. (JULIEN DE ROSA/AFP)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 8 sept. 2023 à 17:20Mis à jour le 8 sept. 2023 à 18:46

Après les annonces de coupes budgétaires et le discours sur « l'argent qui dort » dans les universités, l'exécutif explique, en cette rentrée, qu'il faut « réfléchir au modèle économique des universités ».

« On souhaite lancer un travail » sur ce sujet, a indiqué ce vendredi la ministre de l'Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, lors de sa conférence de rentrée. L'ancienne présidente de l'université Paris-Saclay, qui avait pris des gants pour annoncer les ponctions à venir sur les fonds de roulement à ses anciens collègues, en fin de semaine dernière, a cette fois été beaucoup plus radicale. « C'est notre responsabilité d'utiliser l'argent qui dort, si on veut des solutions pour le pouvoir d'achat des agents. Avec 1 milliard d'euros non utilisés, il faut réfléchir au modèle économique des universités », a-t-elle lancé.

« Les universités doivent faire beaucoup mieux »

Ses propos arrivent après ceux d'Emmanuel Macron, lundi soir, dans son interview au youtubeur Hugo Travers. « Il faut avoir le courage de revoir nos formations à l'université et de se demander : sont-elles diplômantes ? Sont-elles qualifiantes ? » « Les universités, avec leur budget, doivent faire beaucoup mieux », avait répondu le chef de l'Etat.

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« Elles doivent avoir le courage de dire : 'On ne laisse pas ouvertes ces formations parce qu'on a des profs sur ces formations', ce qui est un peu le cas parfois. Mais plutôt : 'Est-ce que cette formation permet de former des jeunes et de leur fournir un emploi ?' » Trop de formations « se passent dans de mauvaises conditions », poursuivait le chef de l'Etat. « Donc on doit réallouer les choses. » L'exécutif veut clairement faire le ménage dans les formations, à l'université comme dans la voie professionnelle.

« Plus de formations courtes »

Emmanuel Macron veut « développer plus de formations courtes, entre un et trois ans, au plus près du terrain, dans des villes périphériques où le coût de la vie est moins important ». Les universités sont concernées, mais aussi les écoles d'ingénieurs et de commerce. « Avec les moyens qu'on met, on doit faire beaucoup mieux », soulignait-il lundi dernier en brandissant le chiffre de « 50 % de jeunes inscrits en licence [qui] ne vont pas se présenter à l'examen ». Et en pointant « un énorme problème d'orientation et une forme de gâchis collectif ».

C'est l'un des axes de la feuille de route de Sylvie Retailleau en cette rentrée. La ministre dit vouloir « une accélération de la transformation de l'offre de formation pour mieux former aux savoirs et aux métiers ». « Nous devons offrir à nos étudiants des parcours qui leur permettent de devenir des citoyens éclairés, mais aussi d'intégrer le monde professionnel, souligne-t-elle. Nous n'avons pas encore gagné la bataille d'une orientation réussie pour le premier cycle universitaire en particulier, nous n'avons pas assez avancé sur la formation tout au long de la vie. »

Des indicateurs pour toutes les licences, d'ici juin

Pour « réindustrialiser le pays, le décarboner et adapter les formations aux besoins de la société », cela passe par l'orientation dès le collège et des filières courtes ou des licences « synonymes d'un parcours fluide et d'une insertion professionnelle réussie », complète Sylvie Retailleau.

Des indicateurs sur les taux d'insertion de toutes les licences générales vont se mettre en place d'ici à juin 2024. Ils concerneront ensuite, fin 2024, les écoles d'ingénieurs, de commerce et les doctorats, pour couvrir l'ensemble du champ de l'enseignement supérieur.

Pour investir dans les filières dites porteuses (alimentation durable, numérique…), l'exécutif mise sur les appels à projet du plan France 2030, avec « près de 20.000 places de formation [qui] seront proposées sur ces enjeux ». Et aussi sur les nouveaux contrats d'objectifs, de moyens et de performance, qui conditionnent l'argent versé aux établissements à la politique menée. Le gouvernement vient d'annoncer deux nouvelles vagues de contractualisation.

Dans l'enseignement supérieur, où le vocable d'« insertion professionnelle » faisait encore bondir il y a dix ans, celui de « performance » interroge. Certains présidents d'université s'étranglent à l'idée qu'on leur ponctionne leurs fonds de roulement et que l'on sanctionne, disent-ils, leur bonne gestion. L'un d'eux, pourtant favorable à cette logique de « performance », pointe aussi « la schizophrénie d'un Etat centralisateur qui veut tout gérer, tout en tenant un discours sur l'autonomie des universités ».

Marie-Christine Corbier

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