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Décryptage

Gestion des forêts : de multiples enjeux parfois difficiles à concilier

Cruciale pour la biodiversité et pour le climat, la forêt joue aussi un rôle économique, faisant vivre 400.000 salariés en France. Le gouvernement espère qu'elle lui permettra de réduire ses émissions de CO 2 , mais aussi d'accélérer sa transition écologique, grâce à un usage accru du bois comme source d'énergie ou comme matériau de construction.

La filière bois tricolore fait vivre 60.000 entreprises, qui emploient près de 400.000 salariés.
La filière bois tricolore fait vivre 60.000 entreprises, qui emploient près de 400.000 salariés. (Photo Jacques Witt/Sipa)

Par Anne Feitz

Publié le 16 août 2023 à 11:31Mis à jour le 16 août 2023 à 12:06

C'est peu dire que le plan de renouvellement forestier du gouvernement est très attendu. Prévu pour la rentrée, il doit permettre de répondre à de multiples enjeux, pas forcément compatibles.

« La forêt assure de multiples fonctions : économiques, environnementales ou sociétales », rappelle Nicolas Riedinger, chef du département développement durable de France Stratégie qui a supervisé une note sur le sujet, publiée en juillet. « Toutes sont essentielles pour le pays, mais elles sont d'autant plus complexes à concilier qu'elles varient, dans le temps et en fonction des territoires. »

Conservation de la biodiversité

Abritant 190 essences d'arbres, 73 espèces de mammifères, 120 espèces d'oiseaux et plus de 6.000 espèces végétales, la forêt française joue d'abord un rôle essentiel dans la conservation de la biodiversité .

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Celle-ci dépend à la fois de la présence de bois mort, qui se réduit, et de très gros bois vivant qui, lui, a plutôt tendance à augmenter : globalement, la biodiversité est pour l'instant préservée en France. Mais une évaluation nationale menée sur la période 2012-2018 a estimé que plus de la moitié des plantes, 17 % des oiseaux et 7 % des mammifères forestiers sont aujourd'hui menacés.

Offrant une protection contre les risques naturels (avalanches, érosion du littoral), jouant un rôle essentiel dans le cycle de l'eau, la forêt assure également une fonction cruciale de puits de carbone grâce au processus de photosynthèse.

La France compte fermement sur sa forêt pour tenir ses objectifs climatiques : selon les documents publiés en juillet par le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), le gouvernement espère qu'elle lui permettra de réduire ses émissions de 10 millions de tonnes d'équivalent CO2 d'ici à 2030.

Un bilan carbone qui se réduit

Pour le moment, c'est plutôt l'inverse qui se produit : sous l'effet du réchauffement climatique, qui ralentit la croissance des arbres et accroît leur mortalité, la forêt et les terres absorbent de moins en moins de carbone en France . Le bilan a été de 16,9 millions de tonnes en 2022, selon les dernières estimations du Citepa, alors qu'il était de 50 millions au milieu des années 2000.

Enfin, la forêt est une matière première, utilisée aussi bien comme source d'énergie que comme matériau : la filière fait vivre 60.000 entreprises, qui représentent près de 400.000 emplois directs. Son exploitation a, elle aussi, un rôle à jouer dans la transition énergétique.

La combustion du bois (directe ou sous forme de biocarburant) est ainsi réputée moins émettrice de CO2 que celle des énergies fossiles (de 0,5 tonne par mètre cube de bois). Par ailleurs, l'utilisation du bois pour des usages de longue durée ( notamment dans la construction ) est plus vertueuse que celle des matériaux couramment utilisés tels que le PVC, l'aluminium, le béton et l'acier (de 1,1 tonne par m3).

D'où la complexité de l'équation. Le SGPE mise sur des besoins en bois supplémentaires pouvant atteindre +30 % en volume d'ici à 2030 (+16 millions de m3, également répartis entre le bois énergie et le bois matériau). Une partie proviendra du bois mort ou des déchets, mais la récolte supplémentaire devra représenter 4 millions de m3, indique le SGPE. Ce qui conduit les ONG à s'inquiéter pour la biodiversité.

Un déficit commercial en hausse

Dans sa note de juillet, France Stratégie relève aussi que, compte tenu du temps dont les arbres ont besoin pour pousser et absorber du carbone, le bilan du bois énergie n'est pas nécessairement positif à très court terme. « Aujourd'hui la moitié des soutiens publics à la filière sont dédiés au bois énergie (qui représente 68 % du bois récolté), il serait sans doute pertinent d'en réorienter une partie vers la production de matériaux », souligne Nicolas Riedinger.

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Il faudra pour cela muscler l'industrie de la transformation du bois. Avec un dernier enjeu non négligeable : redresser le déficit commercial de la filière, qui ne cesse de se creuser (-9,5 milliards d'euros en 2022). « La France exporte du bois brut bon marché et importe des produits transformés à plus forte valeur ajoutée », explique France Stratégie. Une tendance qu'il serait judicieux d'inverser.

Anne Feitz

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