Et une grève évitée de justesse, une! Ce mardi 12 septembre, les contrôleurs aériens ont remporté une nouvelle victoire. C'était in extremis: il restait trois jours avant la date du préavis déposé par leur syndicat majoritaire, le SNCTA, et l'UNSA-ICNA, pour négocier une augmentation de salaire corrélée à l'inflation. La Direction générale de l'aviation civile (DGAC) qui emploie ces hauts fonctionnaires, a voulu éviter un fiasco en pleine Coupe du monde rugby: sans ces ingénieurs qui, depuis leur tour de contrôle, guident les pilotes d'avions, impossible pour Air France et consorts de sillonner l'espace aérien français, premier d'Europe avec 3 millions de vols contrôlés par an. Les 3.900 aiguilleurs du ciel ont gagné. Et apporté une énième preuve de leur redoutable puissance.
Champions européens de la grève, avec 40 jours de débrayage depuis janvier, selon la Fnam, ils sont pourtant loin d’être à plaindre. Payés grâce aux redevances des compagnies aériennes, ils sont rémunérés en moyenne entre 5.000 et 6.000 euros net. Ce n’est pas tout. Ils ne travaillent que 155 jours (via des vacations pouvant aller jusqu'à 12 heures) par an et partiront à la retraite cinq ans avant la plupart des Français, à 59 ans. "Ils ont des horaires de travail tout à fait raisonnables par rapport aux autres fonctionnaires de la catégorie A de niveau de salaire équivalent", estime Laurent Timsit, délégué général de la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (Fnam). Et pourtant, ils sont responsables de 96% des retards liés aux mouvements du contrôle aérien en Europe.
"Nous sommes aussi productifs que les autres"
"Capricieux", "très agaçants", "avec une tendance à tirer sur la corde": en OFF, les piques des connaisseurs du secteur fusent. Des enfants gâtés? Les principaux concernés s’offusquent.
Et une grève évitée de justesse, une! Ce mardi 12 septembre, les contrôleurs aériens ont remporté une nouvelle victoire. C'était in extremis: il restait trois jours avant la date du préavis déposé par leur syndicat majoritaire, le SNCTA, et l'UNSA-ICNA, pour négocier une augmentation de salaire corrélée à l'inflation. La Direction générale de l'aviation civile (DGAC) qui emploie ces hauts fonctionnaires, a voulu éviter un fiasco en pleine Coupe du monde de rugby: sans ces ingénieurs qui, depuis leur tour de contrôle, guident les pilotes d'avions, impossible pour Air France et consorts de sillonner l'espace aérien français, premier d'Europe avec 3 millions de vols contrôlés par an. Selon nos informations, ils ont accepté de se tenir à carreau jusqu’après les JO en échange d'un rattrapage de l’inflation sur leurs salaires, en incluant les primes (qui représentent environ la moitié de leur rémunération). Il y a un an quasiment jour pour jour, en septembre 2022, un scénario similaire s'était produit: les syndicats avaient obtenu gain de cause après une journée seulement de grève. Cette fois encore, les 3.900 aiguilleurs du ciel ont gagné. Et apporté une énième preuve de leur redoutable puissance et de leur moyen de pression.
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Champions européens de la grève, avec 40 jours de débrayage depuis janvier, selon la Fnam, ils sont pourtant loin d’être à plaindre. Payés grâce aux redevances des compagnies aériennes, ils sont rémunérés en moyenne entre 5.000 et 6.000 euros net. Ce n’est pas tout. Ils ne travaillent que 155 jours (via des vacations pouvant aller jusqu'à 12 heures) par an et partiront à la retraite cinq ans avant la plupart des Français, à 59 ans. "Ils ont des horaires de travail tout à fait raisonnables par rapport aux autres fonctionnaires de la catégorie A de niveau de salaire équivalent", estime Laurent Timsit, délégué général de la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (Fnam). Et pourtant, ils sont responsables de 96% des retards liés aux mouvements du contrôle aérien en Europe.
"Nous sommes aussi productifs que les autres"
"Capricieux", "très agaçants", "avec une tendance à tirer sur la corde": en OFF, les piques des connaisseurs du secteur fusent. Des enfants gâtés? Les principaux concernés s’offusquent. "Faites donc une prépa scientifique, passez le concours ICNA, finissez dans les 100 premiers sur quelques milliers, obtenez le diplôme d'ingénieur puis une qualification complète six à huit ans après le bac, acceptez chaque jour la responsabilité pénale en cas d'erreur et vous aussi, vous pourrez travailler un jour sur deux avec 27 jours de congés nuits, week-end et jours fériés inclus, bien sûr", réagit sur Internet un contrôleur face aux critiques.
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En 2010, la Cour des comptes avait épinglé le manque de productivité des agents tricolores. Aujourd’hui, Guillaume Sintes, secrétaire national du SNCTA, assure: "Nous sommes aussi productifs que les autres en Europe. Mais notre rémunération est au moins deux fois inférieure à la moyenne du continent. En période de fort trafic, nous travaillons jusqu’à 36 heures par semaine contre 32 en moyenne." Et de rappeler le quotidien de ses collègues et lui, qui restent concentrés pendant 2 heures voire 2h30 d’affilée pour surveiller les vols, qui donnent toutes les cinq à 10 secondes des instructions à une quinzaine de pilotes…
"C’est un métier contraignant, avec de fortes responsabilités et des horaires décalés car une tour de contrôle fonctionne 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7", confirme Philippe Berland, consultant à Sia Partners. "C’est une profession exigeante, stressante, avec la même technicité que les pilotes d’avion", reconnaît de son côté l’entourage de la DGAC, fair-play. "L’immense majorité a le sens du service public. Ils sont conscients de leur image et essaient de ne pas en abuser."
'Les passagers pensaient que c'était Air France qui faisait grève"
Mais en face, les compagnies aériennes fulminent. En juin, Willie Walsh, directeur général de IATA, l’Association internationale du transport aérien, a dénoncé la récurrence des débrayages français qui "a un impact sur le trafic dans le monde entier parce que cela oblige les compagnies à passer par d’autres pays". Michael O’Leary, le patron de Ryanair, lui, a lancé une pétition pour dénoncer les grèves du contrôle aérien, signée par 1,1 million de citoyens européens, qu'il a emmenée le 7 septembre à la Commission européenne.
La raison de leur courroux? Le pouvoir de nuisance décuplé des aiguilleurs du ciel: en tant que fonctionnaires, ils sont les seuls du secteur à échapper à la loi Diard qui impose de se déclarer gréviste 48 heures avant un conflit. Faute de pouvoir anticiper le nombre d’absents, la DGAC applique donc le service minimum, règlementaire pour les entreprises de transport, obligeant les compagnies à réduire leur vols jusqu’à 50%, au risque de voir trop large. Résultat, entre janvier et avril, à cause du mouvement contre la réforme des retraites, et malgré le peu de grévistes effectifs, Air France a dû annuler 3.000 vols, pour un coût de 10 millions d’euros. "Et les passagers pensaient que c'était Air France qui faisait grève", s’agace un pilote.
Pour venir à bout de ce système, le sénateur UDI Vincent Capo Canellas vient de proposer une loi qui obligerait les grévistes à se déclarer individuellement deux jours avant, adoptée par le Sénat le 15 juin, et appuyée par Clément Beaune, le ministre des Transports. Prochaine étape: l’Assemblée nationale. Dans un rapport paru cet été, le sénateur pointe le retard criant de cette profession, qui utilise encore les bandelettes en papier, les "strips", contrairement à ses homologues européens. "Les infrastructures de base (les radios, les radars, certaines tours de contrôle…), sont devenus obsolètes", alerte l'élu.
La faute aux contrôleurs, qui exigent des contreparties financières aux innovations, comme le soufflent certains? "Les contrôleurs sont plus que jamais en attente de la modernisation de leurs outils qui sont parmi les moins performants d’Europe !", s’insurge Guillaume Sintes. Vincent Capo-Canellas abonde: "La responsabilité de la DGAC, qui n’a pas su mener cette transformation dans les temps, est totale. Elle est en train d'enclencher une révolution culturelle mais il y en a pour des années." Depuis la fin 2022, deux centres de contrôle, à Reims et Aix-en-Provence, testent 4-Flight, un nouveau système informatique conçu par Thales, annoncé à l’origine pour 2015, et dont la facture a dérapé à presque 900 millions d’euros. Aux manettes, le nouveau directeur de la DGAC, Damien Cazé. Ironie du sort, cet énarque vient.... de la Cour des comptes, qui a jadis épinglé les aiguilleurs du ciel.