Reportage

À l'école Estienne, les étudiants font leur rentrée en DNMADE : "C'est stressant et valorisant, il faut être à la hauteur"

Une centaine d'élèves ont fait leur rentrée en première année de DNMADE à l'école Estienne.
Une centaine d'élèves ont fait leur rentrée en première année de DNMADE à l'école Estienne. © Pauline Bluteau / L'Etudiant
Par Pauline Bluteau, publié le 07 septembre 2023
7 min

Ce mercredi 6 septembre, 134 élèves faisaient leur rentrée en première année de DNMADE à Estienne, l'école publique des arts et des industries graphiques à Paris. Une nouvelle année placée sous le signe de l'exigence et de l'assiduité… un peu comme au lycée. De quoi faire monter la pression chez certains étudiants.

À Estienne, la rentrée, c'est peu comme le jour de Noël mais en plein été. Réuni dans la cour, le corps professoral s'impatiente d'accueillir les nouveaux étudiants en DNMADE (diplôme national des métiers de l'art et du design). "Ils sont restés dehors ? Ohh ils n'osent pas. Venez, venez, rentrez", scande Mariette Dupont, la proviseure, depuis le perron de cette école vieille de plus de 130 ans.

C'est donc dans un silence timide que les 134 nouveaux élèves en première année de DNMADE s'apprêtent à faire leur rentrée. "On est vraiment très content de vous voir. Vous étiez 13.000 candidats et vous voici ici aujourd'hui, vous avez du mérite. J'espère que vous êtes fiers d'être dans cette grande école. Que l'aventure qui commence soit belle et réussie", débute la proviseure devant l'amphi bondé.

Une rentrée en DNMADE sous le signe de l'exigence

Au bout de quelques minutes, les étudiants sont déjà en condition. "Rigueur", "travail", "exigence" et "assiduité" viennent ponctuer le discours de l'équipe enseignante. "Ils nous font comprendre que c'est l'excellence. C'est valorisant mais ça montre qu'il faut être à la hauteur", commente Nayah, 18 ans.

Pendant une heure, le personnel insiste sur les retards et les absences qui devront rester exceptionnels. "C'est comme au lycée, au moins, vous ne serez pas dépaysés : si vous êtes en retard, malade… vous prévenez la scolarité. Car si vous avez trop d'absences, vous ne validerez pas votre année", prévient la CPE.

Autant de règles qui rappellent en effet celles du lycée, ce qui a de quoi surprendre les nouvelles élèves. "Ça m'a surprise qu'ils insistent autant sur les absences alors qu'on est dans le supérieur", admet Solène, 17 ans. "J'ai trouvé que c'était très scolaire, je pensais qu'on serait plus livré à nous-mêmes", poursuit Palmyre, 17 ans.

Un suivi personnalisé même dans le supérieur

Même si le cadre semble strict, l'équipe pédagogique met aussi l'accent sur l'accompagnement des élèves. Chaque classe compte environ 12 étudiants en première année, de quoi assurer un suivi personnalisé. Pour Monica, 19 ans, c'est plutôt une bonne nouvelle. L'année dernière, l'étudiante était en première année de licence d'histoire de l'art à l'université. "Ça me change de la fac, je retrouve l'ambiance du lycée et ça me plait, je me sens moins abandonnée." Un avis partagé par Maureen, 18 ans : "Les études supérieures, ça fait super peur mais là, on est bien encadré donc ça rassure." "En fait, la seule chose qui change du lycée, c'est qu'on ait un amphi", s'amuse Solène.

L'ambiance s'apaise un peu lorsque Romane et Maureen, en deuxième année de DNMADE, viennent présenter le BDE (bureau des étudiants) : "On fait des crêpes, on organise plein de moments conviviaux. On a besoin de vous, alors venez !" Une enseignante présente quant à elle son atelier théâtre, très prisé par les étudiants : "Ce sont des moments de pause, on apprend à respirer, à poser sa voix… et parfois, on boit une bière. Enfin, pas dans l'école, après !" Des discours qui provoquent quelques rires dans l'amphithéâtre.

Une ambiance de rentrée timide et stressante

Les étudiants sont ensuite appelés un à un pour rejoindre leur classe. L'école Estienne propose quatre mentions en DNMADE : animation, graphisme, livre et numérique. Chaque mention est déclinée en parcours. Au total, les étudiants sont répartis sur 11 spécialités différentes.

Nayah, Maureen, Monica, Solène et Palmyre, toutes en première année de DNMADE Livre, se retrouvent dans la même salle avec leurs enseignantes. La classe regroupe à la fois les étudiantes en parcours Objet-livre et Reliure… des thématiques qui semblent attirer uniquement les femmes. "On a l'habitude, au lycée en STD2A (bac de sciences et technologies du design et des arts appliqués), c'était quasiment le cas. C'est un peu triste à dire", estime Maureen.

Les présentations se poursuivent. Les professeurs indiquent le matériel dont les élèves auront besoin pour leur cours. "Ma seule demande, c'est un carnet. Un carnet blanc pour prendre des notes et pour dessiner, minimum A5. Mais pas lignés le carnet !, prévient Fabienne Huygevelde, professeure de création éditoriale. Allez, prenez des notes !" Les étudiants sortent timidement leur trousse, leur agenda et leur carnet. La coordinatrice du DNMADE rappelle aussi l'importance de la cohésion de groupe : "Vous n'êtes pas en concurrence, il n'y a pas de concours en fin d'année donc on attend de vous que vous ayez un esprit partagé, on travaille tous ensemble."

Les enseignantes se veulent rassurantes avec les étudiantes en première année : "Vous avez beaucoup de choses à gérer cette année, vous êtes parfois loin de vos proches, vous ne connaissez pas Paris, vous avez un appartement… C'est très angoissant, c'est normal mais il faut nous en parler." Pour Marion, 18 ans, originaire de Nantes, ces paroles ont du sens : "J'étais super stressée ce matin mais là, d'être avec tout le monde, ça va mieux." "Moi, j'étais submergée par le stress et l'excitation parce que tout est nouveau. Au lycée, j'ai eu la même classe pendant trois ans et là, il faut se resociabiliser, c'est pas facile", complète Palmyre, originaire de Clermont-Ferrand.

Marion et Florence (de g. à dr. en bas à gauche) et Palmyre et Solène (de g. à dr. en bas à droite) en première année de DNMADE Livre découvrent leur nouvel environnement.
Marion et Florence (de g. à dr. en bas à gauche) et Palmyre et Solène (de g. à dr. en bas à droite) en première année de DNMADE Livre découvrent leur nouvel environnement. © Pauline Bluteau

Des emplois du temps qui laissent place à la culture

Rien de tel que la distribution des emplois du temps pour rapprocher les élèves. "C'est le moment que vous attendez toutes je suppose !", confirme l'enseignante. Mais, ce sont plutôt de bonnes nouvelles qui s'annoncent. "Je m'attendais à pire : on commence à 8h30 le matin, on finit tôt le vendredi et on n'a pas cours le samedi matin, c'est ce que je voulais !", détaille Florence, 18 ans.

Mais les enseignants les ont prévenues, s'il y a des plages libres… elles ne sont pas tout à fait libres en réalité. Au contraire, elles sont réservées aux workshops, aux conférences ou aux sorties dans les musées notamment. "On voit qu'on va être en contact avec l'extérieur, c'est bien quand on ne connait pas. J'ai hâte de cette vie à côté de l'école", s'enthousiasme Solène.

Prendre du plaisir dans ses études d'art

Après un tour rapide de l'établissement "qui ressemble à l'école d'Harry Potter avec tous ses escaliers", prévient Lorraine de Gouville, leur enseignante de reliure, c'est l'heure de la pause déjeuner. Une véritable cantine où les étudiants attablés se servent dans de grands plats communs. "On se croirait en primaire, ça fait bizarre", rit Nayah.

Après le déjeuner, les étudiantes font connaissance : "J'ai choisi cette mention parce que quand je suis venue aux portes-ouvertes, ça m'a beaucoup plu de voir ce que les étudiants faisaient de leurs mains", raconte Maureen. "Moi, c'est quand j'ai visité les ateliers de l'école que j'ai vu que tout ce qu'on faisait ici, c'était aussi ce que je faisais chez moi depuis des années", complète Nayah.

À 13h40, la cinquantaine d'étudiants en DNMADE Livre se retrouvent en amphi pour leur premier cours de l'année "Humanités". "J'ai pas trop compris ce que c'était, on nous dit que c'est de la philo… c'est pas que j'aime pas ça mais j'attends de voir, ça dépendra du prof !", avoue Nayah.

Les étudiantes sont unanimes, ce dont elles ont le plus hâte, c'est de commencer la pratique en atelier : "De faire, faire de nos mains, de construire", précise Solène. "La charge de travail, on la connait déjà, on a des méthodes qu'on a acquises au lycée mais là, on espère que ce ne sera pas du travail, qu'on prendra plaisir. C'est pour ça qu'on a choisi nos études", conclut Palmyre.

Vous aimerez aussi

Contenus supplémentaires

Partagez sur les réseaux sociaux !