La passementerie, du fil à l’ornement

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©the french makers

 

Peu d’univers sont aussi feutrés et luxueux que celui de la passementerie. Cet art textile ancien consiste à transformer des fils de toute nature en tissus et accessoires d’ornement.

Devenu au fil des siècles un véritable travail d’orfèvre, le métier de passementier permet de créer ou de restaurer des pièces décoratives aussi raffinées que des bijoux. Cette activité textile, qui repose sur différentes techniques, fait partie des spécialités dans lesquelles la France a développé un savoir-faire unique.

 

 

 

La grande famille de la passementerie

 

Le terme passementerie évoque immanquablement les détails raffinés qui caractérisent les décors fastueux et les uniformes d’apparat. Cette atmosphère délicieusement surannée règne toujours dans les dernières maisons de passementerie, où les galons de soie et brandebourgs côtoient les pompons sur-mesure les plus sophistiqués…

En réalité, cette spécialité textile est plus diversifiée qu’on ne le pense, puisqu’elle a aussi d’autres débouchés plus utilitaires, et même techniques. Ainsi, les sangles, ceintures de sécurité, étiquettes et bretelles de soutien-gorge sont considérées comme des éléments de passementerie, au même titre que les embrasses de rideaux à glands, les soutaches ou les cartisanes !

La passementerie constitue donc un vaste domaine indissociable de la rubanerie. Qu’elle soit artisanale ou industrielle, elle regroupe les produits que l’on nommait autrefois « passements« , c’est-à-dire les pièces mesurant moins de 30 cm de largeur. Parmi elles figurent les rubans, franges, tresses, galons, cordons et lacets, mais aussi toutes sortes d’ornements façonnés à partir de fils. Ces pièces sont utilisées en tant que garnitures dans l’ameublement, la décoration et la mode.

 

 

 

La passementerie, d’hier à aujourd’hui

 

Un art textile venu du Moyen-Orient

De vrais galons étaient déjà utilisés dans l’art copte, entre le IIIe et le VIe siècle, mais les premiers fragments assimilés à de la passementerie sont des franges de fils noués, retrouvées dans plusieurs temples et tombeaux à travers le monde (Amérique du Sud, Grèce, Chine, Egypte…) Dès la haute Antiquité, cette technique est employée comme un moyen simple et esthétique d’empêcher un textile tissé de s’effilocher.

Durant le Moyen-âge, les Croisés ramènent nombre d’étoffes précieuses en Europe, qui sont utilisées pour embellir le mobilier liturgique (nappes d’autels, etc.) et les vêtements ecclésiastiques. La passementerie fait partie des nombreux savoirs-faire textiles orientaux que les croisades ont permis de diffuser vers les communautés d’artisans occidentales.

En Europe, les ornements de passementerie se déclinent tout d’abord en laine, puis en soie dès la Renaissance. Ils fleurissent sur les vêtements d’apparat, harnais de chevaux, drapeaux et étendards. En parallèle, ils s’intègrent peu à peu dans la décoration d’intérieur, sous la forme de cordons retenant les lourds rideaux de lits, de franges courtes et de galons bordant sièges et coussins. La corporation des rubaniers, spécialisés dans le tissage au métier et à la navette, est créée au XVe siècle, suivie au XVIe siècle par celle des passementiers, qui travaillent essentiellement à l’aiguille en confectionnant boutons, glands et cordons.

 

L’âge d’or de la passementerie

À partir du règne de Louis XIV et jusqu’à la fin du XIXe siècle, la passementerie et l’utilisation de textiles précieux occupent une place de premier ordre dans la décoration d’intérieur. Le règne du Roi Soleil ouvre la voie à la création d’éléments de passementerie très élaborés, destinés à garnir les pièces de mobilier. Les commandes de la Cour affluent, les passements et ornements s’enrichissent de fils d’or ou d’argent afin d’illuminer les tentures, ciels de lits, coussins et sièges. Pendant plus de deux siècles, les styles décoratifs font la part belle aux détails précieux, à commencer par le style rocaille, puis néoclassique.

Loin de cesser après la Révolution française, l’engouement pour les passements perdure dans les styles Empire et Louis-Philippe, poussant la profession à imaginer de véritables bijoux de fil. Durant cette période faste, les matières évoluent grâce à l’importation de coton d’Égypte, fibre peu onéreuse qui se substitue au lin pour servir d’âme aux guipures et cordons. Par ailleurs, l’invention du métier à tisser Jacquard bénéficie directement à la passementerie en permettant de programmer les motifs tissés grâce à des cartes perforées.

Sous Napoléon III, les décors chargés de l’époque illustrent l’apogée de la passementerie « toutes catégories confondues » : mode, équipements militaires, décoration d’églises, ameublement ou voitures… Cet art textile restera associé au confort bourgeois jusqu’au début du XXe siècle, avant de s’effacer pour laisser place à la sobriété des styles décoratifs contemporains.

 

 

Une combinaison de techniques et savoirs-faire

 

Le métier à tisser, coeur battant d’un atelier de passementerie

En passementerie, il s’agit de créer et fabriquer des ornements ponctuels (brandebourgs, boutons, glands…) ou linéaires (rubans, tresses, galons, cordons, franges, bandes, boutonnières…) La plupart des ateliers vivent au rythme régulier du cliquetis des métiers à tisser, à bras ou plus généralement Jacquard. La spécificité des métiers utilisés en passementerie est de permettre de fabriquer plusieurs rubans ou galons en même temps grâce à plusieurs mini-métiers positionnés en ligne. Ce tissage multiple en simultané nécessite une vigilance de tous les instants pour veiller au bon déroulement des opérations.

Souvent complexe, la réalisation d’un ornement de passementerie repose sur la combinaison de différentes techniques et savoirs-faire traditionnels. Une seule et même création peut ainsi faire appel au tissage, mais aussi au tressage, au nouage, à la broderie… Bien que certains processus de fabrication soient aujourd’hui mécanisés, notamment pour les ornements linéaires, une grande partie du travail s’effectue toujours à l’établi, à la main ou à l’aiguille et l’ensemble du façonnage nécessite une main d’oeuvre experte à chaque étape.

 

Une profession qui rime avec transmission

Aujourd’hui, la branche de la passementerie traditionnelle est représentée par une dizaine d’ateliers en France. Un pied dans le passé, l’autre dans le présent, les passementiers assurent la restauration de décors et mobiliers anciens et restent en phase avec l’époque pour créer des ornements pour la mode, la haute couture, la décoration intérieure…

À ceux qui souhaitent exercer ce beau métier, sachez qu’à l’heure actuelle, il n’existe aucune formation pour devenir passementier. Souvent rattaché au métier de tapissier-décorateur, l’apprentissage de cet « art du fil » se fait directement au sein d’un atelier, auprès d’un professionnel. Sans doute la meilleure façon d’acquérir l’ensemble des gestes techniques (dévidage, ourdissage, tressage, retordage, etc.) et de connaître la multitude de termes spécifiques associés à cette activité qui englobe de nombreuses spécialités.

 

 

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Elsa Laurent

Elsa Laurent

Designer dans l’industrie textile en habillement et en ameublement, je suis co-fondatrice de Textileaddict.me depuis 2017. J'aime partager mes connaissances et bons plans du textile mode et maison. Mon objectif : permettre aux acteurs du secteur de se mettre facilement en relation pour développer leurs projets.

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