« Ils veulent faire fuir les étudiants, il n’y a aucune place, ça me révolte », souffle Océane, habitante de Trilport (Seine-et-Marne). Cette étudiante vient d’obtenir sa licence de droit à l’Institut Catholique de Paris. Mais depuis, son avenir semble flou. Océane enchaine les candidatures dans des masters partout en Ile-de-France, sans succès.
« J’ai postulé partout. J’ai commencé à avoir des réponses depuis juin. »
Un « Parcoursup » pour les masters
En janvier 2023, le gouvernement a lancé la plateforme Mon Master, un « Parcoursup » pour les étudiants qui souhaitent accéder à une formation en master. L’objectif du gouvernement : faire baisser de 30 % les recours rectoraux introduits par les étudiants refusés en quatrième année. C’est loupé pour le cas d’Océane.
L’étudiante trilportaise a essuyé les refus dans les 15 vœux réalisés sur la plateforme. Et ce malgré des résultats scolaires corrects . « J’ai fait des choix en fonction de mes notes. J’ai notamment postulé en droit pénal – sciences criminelles. En procédure pénale, j’avais 14,5 de moyenne l’année dernière. »
« Les formations sont bouchées, il n’y a pas assez de places »
Seule solution pour l’étudiante de 21 ans : saisir le recteur de l’Académie de Créteil. « J’ai déposé mon dossier à la fin du mois de juin. Fin août, le rectorat m’a proposé 15 nouveaux vœux. » Mais là encore, Océane pointe une faille dans le système. D’après l’étudiante, le rectorat n’a pas accès aux données de Mon Master et ne voit donc pas les formations auxquelles les étudiants ont déjà postulé.
Il ne connaîtrait également pas le taux de remplissage des différentes filières.
Ils ont demandé pour moi des facs qui m’ont déjà refusée. Ils respectent mes envies mais les propositions ne sont pas adaptées à mon dossier. » Le rectorat aurait également proposé à la jeune femme de postuler dans des facultés très sélectives. « Les formations sont bouchées, il n’y a pas assez de places.
Depuis, Océane garde les yeux rivés sur son téléphone, à l’affut de chaque arrivée de mail. « Dring », le téléphone sonne, la pression monte pour la Trilportaise. « Lire mes mails devient une phobie. J’en fais des cauchemars, j’ai peur », raconte-t-elle alors qu’elle ouvre l’application « Mail » sur son téléphone. Résultat : encore un refus à une formation en master.
Cette année encore, et depuis la réforme de la sélection en master 1 votée en 2017, de nombreux étudiants cherchant à poursuivre leurs études après avoir validé trois années de licence se retrouvent, comme Océane, bloqués aux portes du master, faute de places dans des filières particulièrement demandées comme le droit, la psychologie ou les sciences politiques.
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Le droit, une filière en tension
Selon L’Etudiant, la licence de droit reste la plus demandée sur Parcoursup, avec 310 289 vœux en 2023. C’est encore plus que l’année passée (296 610 demandes). Alors qu’elle reste très sélective selon les universités, la licence de droit continue d’attirer de plus en plus d’étudiants. Ces jeunes bacheliers devront, d’ici quelques années, intégrer un master. La situation semble donc bouchée pour de nombreuses années.
En 2021, Frédérique Vidal, alors ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, avait pourtant annoncé la création de places supplémentaires dans ces filières « en tension ». Malgré de bons dossiers, les étudiants sont encore nombreux à se retrouver sur la touche. La sélection en master et le manque de places sont vécus comme une nouvelle épreuve qui mène certains à l’abandon.
J’y ai pensé [à abandonner]. Ça me dégoute, je ne trouve pas ça normal de se battre pour étudier. Je me rends compte qu’aller à la fac, c’est une chance
L’étudiante a postulé dans pas moins de 50 formations différentes, en vain. « Un algorithme décide de notre avenir, ça me révolte ! »
Quelles options pour les jeunes sans master ?
Aujourd’hui, Océane dit être « presque sûre que je n’aurai rien » alors que les rentrées scolaires sont déjà passées ou sont en cours dans les différentes facultés. « Je ne sais pas quoi faire. Est-ce que je dois changer d’orientation ? Je n’en ai pas envie. Mais là, je vais perdre une année », s’inquiète la Trilportaise.
Plusieurs possibilités existent pour les étudiants sans affectation à la rentrée, comme Océane. En commençant par se tourner vers les écoles privées. Mais ces études ont un coût : entre 7 000€ et 9 990€ par an. Les étudiants peuvent également profiter de cette année blanche pour renforcer leur dossier avec la réalisation de stages tout au long de l’année.
« Je vais devoir passer par là », se résigne Océane.
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