Formation des enseignants : le réseau des Inspé propose de créer une licence dédiée

Séverine Mermilliod Publié le
Formation des enseignants : le réseau des Inspé propose de créer une licence dédiée
Le réseau des Inspé veut créer une licence dédiée. // ©  plainpicture/myriam tirler
Alors qu'une réforme de la formation initiale des enseignants se dessine au sein du gouvernement, le réseau des Inspé, instituts qui forment les enseignants du premier et second degré, propose de créer une licence dédiée.

Mi-septembre, le gouvernement lançait une concertation autour de l'attractivité du métier d'enseignant. Une décision prise après une nouvelle rentrée compliquée par la crise des vocations et la pénurie de professeurs.

En parallèle, une réforme de la formation des enseignants est envisagée pour qu'elle soit "dès l'après-bac, professionnalisante", selon les mots d'Emmanuel Macron, pour une mise en œuvre en 2025. Parmi les pistes de travail : l'avancée du concours de la fin du master à la fin de licence (L3).

Dans l'espoir d'être entendu par le gouvernement, le réseau des Inspé (Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation) présente, lors de son point presse de fin septembre, sa proposition de réforme pour améliorer la "lisibilité des parcours de formation".

Une nouvelle licence enseignement-éducation

Les Inspé reviennent donc sur leur proposition de créer une licence dédiée, accessible sur dossier : la licence EE (enseignement-éducation). Celle-ci viserait à préparer l'actuel master MEEF (Métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation), en deux ans.

Il faudrait informer, "dès le lycée, pour permettre aux étudiants de rejoindre un cycle de licence dédié", précise Pierre Chareyron, directeur de l'Inspé de Lyon.

Cette licence accueillerait des étudiants, en apprentissage dès la L2, sur le modèle des assistants d'éducation (AED) en pré-professionnalisation, qui combine ancrage universitaire et présence en établissement mais sans être en responsabilité. La rémunération de L3 serait plus importante que celle de L2.

Dans ce schéma, les lauréats du concours avancé en fin de L3 deviendraient ensuite étudiants contractuels alternants en M1, puis fonctionnaires stagiaires en M2, avant une titularisation en fin de master MEEF. Soit un parcours très progressif vers le métier d'enseignant.

Concours rénovés : un premier bilan mitigé

"On note une amélioration du rendement des concours" en 2023, se réjouit Elsa Lang Ripert, vice-présidente du réseau des Inspé en charge du pilotage et directrice de l'Inspé de Bourgogne. Le taux de postes pourvus atteint 84% dans le premier degré et de 86% dans le second degré, en hausse par rapport à 2022. La majorité des étudiants qui réussissent le concours sont des étudiants de MEEF.

Toutefois, quatre académies sont en difficulté : Versailles, Créteil, La Guyane et Mayotte. Certaines matières connaissent également des pénuries dans le second degré, en particulier les maths, l'allemand et les lettres classiques.

Une professionnalisation pas à pas, avec des points de vigilance

"L'idée d'une formation intégrée et professionnalisante fait relativement consensus parmi les acteurs", assure Alain Frugière, président du réseau et directeur de l'Inspé de Paris. D'autant que, comme le rappelle, Nathalie Catellani, vice-présidente de la recherche, "l'alternance intégrative, les AED pré-professionnalisation et les contrats alternants en M2" sont "plébiscités par les étudiants".

L'idée d'une formation intégrée et professionnalisante fait relativement consensus parmi les acteurs. (A. Frugière, réseau Inspé),

Toutefois les étudiants "ne doivent pas boucher des trous" en étant pris "comme des moyens d'enseignement", souligne Pierre Chareyron, en insistant sur le fait que la prise de responsabilité doit être "progressive",

Le réseau demande à ce que la réflexion soit la même pour le premier et le second degré. En effet, certains craignent qu'une avancée du concours en fin de L3 entraîne un raccourcissement de la formation pour le premier degré. "Ce serait une régression terrible qu'on forme à trois années d'études", selon Elsa Lang Ripert, vice-présidente en charge du pilotage.

Vers des parcours dès la licence plus lisible vers le master MEEF ?

Le but de ce parcours progressif est d'éviter de perdre en cours de route des étudiants intéressés par l'enseignement, en rendant le parcours plus lisible et ce, dès la sortie du bac.

À Lyon, "on n'a pas de licence identifiée menant au master MEEF, témoigne ainsi Pierre Chareyron. Sur les salons d'orientation, on conseille aux lycéens de se renseigner auprès des universités pour choisir une licence, et de revenir nous voir ensuite, car on ne s'occupe que du master."

À l'inverse, illustre Elsa Lang Ripert, le master MEEF premier degré de Nevers avait "du mal à attirer. L'Inspé Bourgogne a monté une licence 'éducation formation enseignement et culture', également proposée à Dijon. Depuis, nous avons fait le plein avec un fort taux de pression sur Parcoursup et plus aucune difficulté à recruter en M1 à Nevers."

Un impact limité sur le master MEEF

Les Inspé n'envisagent pas de modification majeure du Master MEEF, qui selon eux a "abouti". Mais si le concours est déplacé en L3, alors "il faudra probablement des ajustements, car le master actuel comporte une préparation importante du concours", souligne Alain Frugière.

Le nombre d'étudiants inscrits en Inspé en baisse

Les inscriptions en M1 MEEF "sont à la baisse, avec une baisse de 5% dans le premier degré et de 8% dans le second degré", explique Nathalie Catellani, vice-présidente de la recherche et directrice de l'Inspé Picardie.

Un recul qui s'expliquerait par la diminution générale des inscriptions à l'université (-3,4% sur l'ensemble des cursus), elle-même liée à la baisse démographique et à une difficulté "qui reste à confirmer" à s'inscrire sur la plateforme MonMaster. Là encore, la baisse reste concentrée sur "une poignée d'Inspé, comme Versailles et Créteil".

Séverine Mermilliod | Publié le