Pour répondre à la demande des entreprises et des acteurs publics en matière d’environnement, de nombreuses formations voient le jour ces dernières années. Sur le site Internet de la Conférence des grandes écoles, les cursus en « transition écologique », « industrielle », « numérique », ou « énergétique », en « RSE » (responsabilité sociétale des entreprises) ou en « développement durable » fleurissent par dizaines.
Mais face à une nouvelle génération de diplômés de plus en plus sensibles à l’urgence écologique, les enseignants prennent conscience du risque d’écoanxiété qui peut survenir une fois en entreprise. « Plus ces jeunes professionnels accumulent des connaissances et montent en expertise, plus leur conscience de l’urgence écologique et des limites planétaires est forte et se confronte à l’inertie qui prévaut dans notre société et dans de nombreuses entreprises », commente Aurélien Acquier, professeur à l’ESCP Business School, où il enseigne notamment les « limites planétaires ». L’écoanxiété et le « risque de surinvestissement » qui peut en découler constituent donc, selon lui, un « réel enjeu de santé au travail », dont les entreprises doivent s’emparer.
En outre, dans ces structures, « les équipes chargées de la transition écologique sont encore petites face à la charge de travail due aux contraintes réglementaires croissantes. Cela peut accentuer les questionnements de certains », complète Anne-Catherine Moquet, coresponsable du master management de la RSE de l’IAE Gustave-Eiffel (Université Paris-Est-Créteil). Chaque année, dans cette formation en alternance, « seuls quatre ou cinq étudiants sur vingt-cinq, estime-t-elle, expriment des déceptions par rapport à ce qu’ils projetaient sur le métier et à l’impact qu’ils pensaient avoir ». Pour éviter « les désillusions et les risques psychosociaux » chez des étudiants « clairement plus engagés qu’il y a dix ans sur les questions écologiques », la formation essaie donc de développer « leur esprit critique sur la RSE, ses limites et défis – quitte parfois à être accusée de pessimisme par les étudiants », explique l’enseignante dans un sourire.
Des tensions entre les enjeux
La démarche est proche au sein du master management des organisations et développement responsable de l’université de Montpellier, où on aborde d’emblée, en s’appuyant sur la recherche, la question des contradictions, au sein de l’entreprise, entre les enjeux économiques, sociaux et environnementaux. « Dès qu’on actionne un de ces leviers, cela entre en général en tension avec les deux autres, commente Florence Palpacuer, l’enseignante-chercheuse qui pilote la formation. Notre but est d’aider les étudiants à comprendre les mécanismes de ces tensions dans différents types de structures afin qu’ils soient, une fois arrivés en entreprise, capables de trouver des marges de manœuvre pour agir. »
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