Décryptage

La fermeture de l'école d'art publique de Valenciennes se précise pour 2025

L’école d’art et de design de Valenciennes fermera sans doute ses portes en 2025.
L’école d’art et de design de Valenciennes fermera sans doute ses portes en 2025. © Photo fournie par l'établissement
Par Caroline Celle, publié le 11 octobre 2023
1 min

En raison de son instabilité financière, l’école d’art et de design (Esad) de Valenciennes se prépare à fermer ses portes en 2025. De nombreux étudiants s’étaient fortement mobilisés pour sauver l’établissement, qui ne peut désormais plus accueillir de nouvelle promotion. Une décision encore un peu difficile à avaler.

L’annonce est tombée comme un couperet : l’École supérieure d’art et de design de Valenciennes (Esad), dans les Hauts-de-France, fermera sans doute ses portes en 2025. Lors d’un conseil d’administration à l’été 2023, l’Esad a appris qu’elle allait perdre son accréditation au-delà de cette date, en raison de son manque de solidité financière.

Or, sans cette accréditation, accordée par les ministères de la Culture et de l'Enseignement supérieur, impossible pour l'école de délivrer ses diplômes de bac+3 (diplôme national d'art – DNA) et de bac+5 (diplôme national supérieur d'expression plastique – DNSEP). Une douche froide pour l'école et ses quelques étudiants encore présents.

La fermeture de l’Esad de Valenciennes envisagée depuis des années

La situation n’est pas étonnante : en 2012, le maire de Valenciennes, Laurent Degallaix, a annoncé qu’il allait réduire progressivement les subventions municipales de l’établissement. En effet, en dix ans, ces subventions sont passées de 1,4 million d'euros à 350.000 euros. Or, l’Esad est une école d’art territoriale publique subventionnée aux deux tiers par les collectivités territoriales.

"Quand j’ai intégré le cursus il y a sept ans, on entendait déjà des bruits de couloir sur de gros problèmes de budget, se souvient Téa Laurent, élève fraîchement diplômée et ex-représentante de l’Esad au sein de l’Andéa (Association nationale des écoles supérieures d’art). L’école était vue comme un bateau à la dérive et les étudiants manifestaient pour la défendre auprès de la Ville."

Pas de nouveaux étudiants ni via Parcoursup et ni en master

La situation prend une autre tournure à l’automne 2022. L’école de Valenciennes annonce un déficit de 300.000 euros et les menaces de fermeture se font ressentir. "Les profs et les étudiants se sont mobilisés par tous les moyens pour tenter de sauver l’Esad, relate Chloé Terrée, ancienne étudiante en DNA (équivalent d’une licence). On a fait des manifestations et on a même occupé les locaux nuit et jour pendant un mois ! C’était épuisant psychologiquement mais on avait beaucoup d’espoir à l’époque. On a finalement compris qu’on ne pouvait pas avoir de dialogue avec les collectivités."

À partir de 2023, le conseil d’administration décide que l’école ne pourra pas recruter de nouveaux étudiants sur Parcoursup pour l’année suivante. Elle ne pourra pas non plus recruter en DNSEP (équivalent du master). "Nous n’avons plus d’étudiants en première année ni en quatrième année, confirme Stéphane Dwernicki, le directeur de l’école. Mais d’ici la rentrée 2025 tous les inscrits pourront terminer leur cursus de licence ou de master."

L’école s’est pourtant battue pour retrouver son équilibre financier à la rentrée 2023. Dans la masse salariale, deux postes de professeurs ont été supprimés, tandis que d’autres sont passés à mi-temps. "On a fait des coupes un peu partout dans le budget, explique Stéphane Dwernicki. On fait très attention à nos dépenses en électricité, on a obtenu des subventions européennes pour organiser certains workshops… On a des contraintes mais j’estime qu’on a préservé la qualité de l’enseignement et des projets."

Penser l’avenir après la fermeture de l'école d'art

Cela n'a pas suffi. La Ville et la Métropole de Valenciennes soutiennent qu’elles ont besoin d’un fonds de roulement pour rester à flot. Mais le directeur de l’Esad veut croire que tout est encore possible. "On pourrait dégager 20.000 euros sur trois ans en installant des outils de suivi, s’agace-t-il. Sur le papier, rien ne nous empêche d’aller chercher la future accréditation ! Une école qui ferme, c’est un mauvais signal, on ne peut jamais s’en féliciter."

Les étudiants se montrent plus désenchantés. Selon Yalhma, étudiante en cinquième année de design, la plupart ont accepté la fermeture de l’école. "On était une centaine d’élèves l’année dernière et on n’est plus qu’une soixantaine cette année, constate-t-elle. L’ambiance est très différente parce que la mobilisation est retombée. On s’est beaucoup investis dans cette bataille, et maintenant, on veut tous aller de l’avant et profiter des derniers moments ensemble."

Plusieurs étudiants envisagent de terminer leur cursus ailleurs mais la situation est complexe. Au sein de l’école, 50% des inscrits sont boursiers, et la plupart sont originaires de la région. Laurette est en deuxième année à l’Ésad et fait partie de ceux qui ne pourront pas intégrer le niveau master à Valenciennes. "J’ai de grosses interrogations sur la troisième année parce que je suis très attachée à cette école, confie-t-elle. Mais je pense que j’intégrerai une école pérenne, où j’aurai l’esprit plus tranquille."

D'autres écoles d'art en pleine crise

Dans la région des Hauts-de-France, les étudiants de Valenciennes pourront encore s’orienter vers des écoles à Tourcoing, Cambrai ou Dunkerque. Mais la spécialité de l’Esad de Valenciennes, le design éco-social, ne se trouvera plus à proximité.

En France, plusieurs écoles publiques d’art sont en grande difficulté financière et doivent supprimer des postes, comme à Angoulême et Poitiers. La fermeture de l’école de Valenciennes pourrait être la première d’une longue série.

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