Les régions à la recherche d’un "choc de décentralisation" en matière d’orientation

Marine Ilario Publié le
Les régions à la recherche d’un "choc de décentralisation" en matière d’orientation
Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, auprès de lycéens, réclame la compétence entière sur l'orientation. // ©  Alexandra BREZNAY/REA
Lors des rencontres inter-régions de l’orientation, une demande forte a émané des deux tables rondes qui ont rassemblé les acteurs de l’orientation : les régions demandent plus de compétences en la matière.

"Les régions sont les pivots en matière de politique d’orientation et c’est pour cela que nous avons besoin d’un choc de décentralisation pour être au plus près des besoins". Par ces mots, Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, a introduit les deuxièmes rencontres inter-régions dédiées à l’orientation qui se sont tenues le 4 octobre au siège de la région Ile-de-France.

Acteurs du service public, politiques et acteurs privés se sont réunis autour de deux tables rondes pour essayer de comprendre le rôle des régions dans le service public de l’orientation. Si les régions disposent de plus en plus de compétences en la matière, elles souhaitent que celles-ci soient encore plus poussées et approfondies, pour répondre aux besoins de leurs territoires.

Les régions veulent plus de compétences sur les politiques d'orientation

Pour les intervenants de ces tables rondes, la région est l’échelon idéal pour gérer les politiques d’orientation d’un territoire. "En termes d’efficacité opérationnelle, de soutien économique mais aussi de proximité, la région est l’échelon optimal", appuie Bernard Cohen Hadad, président de la CPME (la confédération des petites et moyennes entreprises). "Sans la région comme interlocuteur, on ne peut pas avancer".

Nous demandons une compétence plus approfondie et plus poussée sur l'orientation. Nous voulons la compétence pleine et entière sur ce sujet. (O. Nasrou, région IDF)

Othman Nasrou, vice-président de la région Ile-de-France chargé de la jeunesse, de la promesse républicaine, de l’orientation et de l’insertion professionnelle, de l'enseignement supérieur et de la recherche, va plus loin. "Nous demandons une compétence plus approfondie et plus poussée sur l'orientation. Nous voulons la compétence pleine et entière sur ce sujet."

La nécessité d’une coopération entre les régions

Si le besoin de donner toutes les compétences aux régions se fait sentir, celles-ci n’envisagent pas de cloisonner leurs systèmes. Sur les questions d’orientation, le temps est à la coopération inter-régions. Othman Nasrou le rappelle : "avoir la compétence pleine et entière ne veut pas dire qu'on travaille seul".

En Ile-de-France, par exemple, les trois académies (Paris, Versailles et Créteil) collaborent et nouent des partenariats sur des problématiques liées au territoire. "Les trois académies sont en lien avec Oriane [l’agence régionale de l’orientation, ndlr] pour s’entraider sur la question des stages. Cela a permis de créer une plateforme dédiée qui propose des milliers d’offres, cette année", précise le vice-président de la région Ile-de-France.

Prendre en compte les spécificités territoriales

Pour être efficace, il semble indispensable de considérer les disparités entre les régions d’une part, mais aussi entre les territoires d’une même région. En effet, une expérience réussie sur un territoire pourra ne pas fonctionner dans un autre.

En Normandie, par exemple, les académies s’entraident en se fournissant des données. "On fait un travail fin sur les formations qui ne remplissent pas. Cela nous permet de connaître les formations 'insérantes' mais non attractives et de proposer des plans d’action pour lutter contre ça", explique Denis Leboucher, directeur de l’agence régionale de l'orientation et des métiers de Normandie.

Pour Bernard Cohen Hadad, "en mutualisant l’ensemble des compétences en fonction des territoires, les régions vont pouvoir orienter les jeunes notamment vers les nouveaux métiers, mais aussi les métiers en tension".

Parler d’une seule voix sur les territoires

Reste la question de l'information. Il faut que le public visé connaisse les dispositifs mis en place dans sa région.

Ainsi, en Normandie, il existe "une pression énorme puisque nous avons besoin de 1.500 personnes par an" dans le nucléaire, indique Denis Leboucher. L’agence régionale de l'orientation et des métiers de Normandie, la région et le rectorat ont donc répondu à un appel à manifestation d'intérêt "Métiers 2030".

Au total, 57 millions d’euros seront alloués à la région. Celle-ci entend financer à hauteur de 5 millions d'euros des dispositifs d'aide à l'orientation : outils d’accompagnement pour les classes, escape games, etc.

Mais le travail ne s’arrête pas là. Comme le rappelle Denis Leboucher, il est essentiel de faire un travail de communication commun sur tout le territoire. "Ce qui est important c’est aussi le message collectif qu’il y a derrière les dispositifs. Par exemple, on ne pourra remplir les formations qu’en faisant parler d’elles", illustre-t-il.

Le besoin de structurer le service public de l’orientation

Pour une meilleure coordination entre les régions, les SPRO (service public régional de l’orientation) ont besoin de se structurer davantage. A l’échelle régionale d’abord, où les dispositifs doivent être articulés, sur l’ensemble du territoire.

Pour Denis Leboucher, "il est nécessaire d’avoir un coordonnateur régional". Son but : faire connaître les dispositifs existants (salons d'orientation, professionnels présentant leur métier aux jeunes, plateforme d'offres de stage, visualisation de métiers grâce à la réalité virtuelle...) et coordonner leur mise en place sur tout le territoire.

A l’échelle nationale ensuite. Puisque les expériences des uns peuvent profiter aux autres, il est nécessaire que les régions puissent facilement avoir accès à ce qui se fait ailleurs. Les régions doivent produire un bilan des activités du SPRO.

Mais aujourd'hui, le contenu de ces bilans est très disparate selon les régions "car il n’existe pas de décret qui indique précisément ce qu'il doit contenir", regrette Denis Leboucher.

Marine Ilario | Publié le