J. Bianco (APLCPGE) : "Sur le terrain, nous constatons que la baisse annoncée des effectifs en prépa n'a pas eu lieu"

Agnès Millet Publié le
J. Bianco (APLCPGE) : "Sur le terrain, nous constatons que la baisse annoncée des effectifs en prépa n'a pas eu lieu"
Joël Bianco, proviseur du lycée Louis-le-Grand, dresse les enjeux pour l'année scolaire à venir. // ©  MP Studio/Adobe Stock
Quelques semaines après la rentrée dans les classes prépa, Joël Bianco, président de l'Association des proviseurs de lycées à classes préparatoires aux grandes écoles (APLCPGE), dresse les enjeux pour l'année scolaire à venir. Effectifs, conventions avec les universités… Plusieurs dossiers sont sur la table.
Joël Bianco APLCPGE
Joël Bianco APLCPGE © Photo fournie par le témoin

Depuis plusieurs années, la tendance est à la baisse dans les effectifs des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE). Avez-vous des chiffres pour la rentrée 2023 ?

Nous n'avons pas de chiffres consolidés et fiables sur les effectifs de rentrée en prépa. En revanche, nous connaissons les chiffres Parcoursup qui montrent plutôt une augmentation des demandes et des acceptations de candidatures en filière prépa.

Par ailleurs, sur le terrain, depuis la rentrée, nous constatons que la baisse annoncée n'a pas eu lieu. Il y a une stabilité globale. C'est bon signe. En revanche, certains échos confirment une disparité selon les filières, les lycées et la zone géographique des classes.

Quelles disparités observez-vous ?

Nous voyons ainsi que les zones moins urbaines sont moins attractives, notamment pour les classes prépa économiques et commerciales, voie générale (ECG). Si, au global, la filière n'accusera probablement pas de baisse générale, certaines CPGE continueront sûrement à être en difficulté. Je crains qu'il n'y ait un creusement des écarts.

C'est également le cas en filière biologie, chimie, physique et sciences de la Terre (BCPST). La concurrence qui existe fait plus de dégâts dans certains sites, là où les écoles agro et veto ont commencé à recruter directement en post-bac.

Pour la filière ECG, il y avait un moratoire sur les fermetures de classes à la rentrée 2023. Mais en 2024, il est presque certain qu'il y aura des fermetures.

Nous restons donc prudents, en attendant le bilan des effectifs inscrits. Pour la filière ECG, il y avait un moratoire sur les fermetures de classes à la rentrée 2023. Mais en 2024, il est presque certain qu'il y aura des fermetures. Si les effectifs sont trop bas, les rectorats devront arbitrer dans la gestion de leurs enveloppes.

Sur le point de l'attractivité des prépas, vous menez une enquête sur le bien-être étudiant. Comment est-elle constituée ?

Oui, nous demandons aux étudiants ce qu'ils pensent de leurs études. Le questionnaire est organisé en cinq parties dont une partie sur la scolarité en prépa, une autre sur le cadre de vie mais aussi sur la violence et le harcèlement en milieu scolaire.

L'anonymat de l'étudiant et de l'établissement est préservé et le formulaire comporte des questions ouvertes. Nous avons sondé les élèves de 2e année, avec un bon taux de réponse. Aujourd'hui [le 18 octobre], près de 10% d'entre eux nous ont répondu, soit près de 4.000 réponses en un mois.

Nous devrons ensuite dépouiller tout cela. Nous aurons les premiers éléments en décembre. Nous présenterons probablement des résultats lors de notre congrès en janvier, en lien avec le calendrier Parcoursup. Et en janvier-février, nous sonderons également les élèves de 1re année.

Pourquoi cette démarche ?

Il faut construire sur ces retombées de terrain, sur l'expression des étudiants. En croisant les approches, ce sera un moyen, à notre modeste niveau, de communiquer auprès de l'opinion publique, avec de la nuance.

 Les gens ont beaucoup de représentations de la prépa. Et si nous observons qu'il y a des choses à améliorer, des failles, nous proposerons des pistes d'amélioration. Le bien-être étudiant est l'une de nos trois priorités. Il faut creuser la question.

Il faudrait faire évoluer un peu le modèle des prépas économiques et commerciales générales, pour davantage de continuité pédagogique entre les ECG et les écoles de commerce

Quelles sont vos autres priorités ?

Nous voulons créer du lien, en interne, entre nos adhérents, pour faire vraiment réseau, nourrir une réflexion commune et un travail collaboratif.

Notre dernière priorité est de promouvoir les prépas, en défendant ce modèle. Nous voulons devenir un partenaire, en ouvrant la discussion, sans être figé.

Nous étions d'ailleurs dans le comité de pilotage des ECG durant le projet de réforme des programmes, au premier semestre 2023. Nous avons fait des propositions, pour ne pas être seulement dans un affrontement entre camps et modèles de formations.

Selon moi, il faudrait faire évoluer un peu le modèle des prépas économiques et commerciales générales, pour davantage de continuité pédagogique entre les ECG et les écoles de commerce. Mais je n'ai pas eu d'échos depuis la suspension du projet.

Vous évoquiez aussi des difficultés concernant les conventions entre les prépas et les universités ?

Oui, des dysfonctionnements ont été signalés cette année, surtout en CPGE littéraire. Près d'une centaine d'étudiants – parfois sous-admissibles ou admissibles à une ENS ou dans une autre école - se sont vus refuser une admission en L3, alors qu'ils étaient dûment inscrits en régime cumulatif dans le cadre d'une convention.

Les recteurs des académies ont été sollicités pour trouver des solutions pérennes. Nous avons trouver des solutions au cas par cas. La raison invoquée par les universités était qu'elles n'avaient pas les capacités d'accueil pour accepter ces étudiants. Depuis plusieurs années, certaines universités ont, en effet, multiplié les conventions avec les prépas.

Nous comprenons qu'il est impossible de pousser les murs. Mais, à l'avenir, il faut reclarifier les choses, pour éviter des déconvenues pour la rentrée. Est-ce que l'accueil doit se faire de droit ou y a-t-il des critères à remplir ? Nous devons mettre les choses à plat et trouver un pilotage à l'échelle académique et à l'échelle nationale.

Ce qui nous importe, c'est de sécuriser les parcours des étudiants, c'est ça l'idée de départ des conventions entre universités et prépas.

Agnès Millet | Publié le