Gabriel Attal l’a promis : des « mesures fortes » seront annoncées début décembre pour « élever le niveau général » des élèves. Parmi elles, le ministre de l’éducation nationale a plusieurs fois avancé la possibilité de réunir les élèves par groupes selon leur niveau en mathématiques et en français au collège. « Quand vous avez des élèves qui ont un niveau tellement différent dans une même classe (…), vous finissez par tirer tout le monde vers le bas », a-t-il justifié devant le Sénat, le 8 novembre. La mission, dite « exigence des savoirs », lancée début octobre pour préparer les futures mesures et dont les conclusions sont attendues, a ainsi été chargée d’« expertiser » la proposition.
La gestion de l’hétérogénéité, consubstantielle au collège unique depuis sa création en 1977, est au cœur de toutes les réflexions sur ce segment de la scolarité depuis près de cinquante ans. L’idée d’y répondre par un fonctionnement en groupes de niveau n’emporte cependant l’adhésion d’aucun syndicat enseignant, à l’exception du Snalc. Ce syndicat minoritaire propose depuis plus de dix ans une organisation « modulaire » du collège. A partir de la 5e, les élèves seraient répartis, pour les mathématiques et le français, entre des groupes « d’approfondissement » et, pour les élèves en difficulté, des groupes « fondamentaux », bénéficiant d’effectifs réduits. Une idée que le ministre, s’il n’a rien détaillé de l’organisation qui pourrait être envisagée au collège, a plusieurs fois donnée en exemple.
Ce faisant, Gabriel Attal s’engage sur une ligne de crête dont la recherche a montré les risques. « Gérer l’hétérogénéité par des logiques de séparation des élèves selon leur niveau ne fonctionne pas et cela a même des conséquences délétères : ça creuse les inégalités et, les comparaisons internationales le montrent, ça n’élève pas le niveau général », affirme Dominique Lafontaine, professeure émérite en sciences de l’éducation à l’université de Liège.
« Effets catastrophiques »
Les travaux menés sur les classes de niveau ont établi que l’effet de « stigmatisation » conduisait à une perte d’estime de soi et de motivation des élèves des classes les plus faibles, affectant ainsi leurs résultats scolaires. Ils ont également montré que, face à un groupe fragile, les enseignants, qui se rejoignent sur la difficulté à gérer des classes homogènes dont le niveau est faible, ont tendance à adapter leurs objectifs d’apprentissage à la baisse.
A l’inverse, les élèves des bonnes classes bénéficient d’une meilleure confiance en eux et d’une émulation qui leur est profitable, creusant ainsi les écarts avec les plus en difficulté – qui sont aussi les plus défavorisés socialement. Les résultats concernant les bons élèves, moins sensibles que les plus fragiles à la composition de leur classe, ne sont cependant pas univoques.
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