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Décryptage

Ces chiffres détonants sur l'activité des médecins généralistes

En pleine négociation avec les syndicats de médecins libéraux sur leur rémunération, l'Assurance Maladie a publié une batterie de données sur les généralistes. Elle relativise certains cris d'alarme même si la baisse des effectifs se fait bel et bien sentir.

La part des généralistes ayant une activité libérale (mixte ou exclusive) s'est stabilisée autour de 66 %.
La part des généralistes ayant une activité libérale (mixte ou exclusive) s'est stabilisée autour de 66 %. (Patrick Allard/REA)

Par Solenn Poullennec

Publié le 6 déc. 2023 à 17:01Mis à jour le 6 déc. 2023 à 19:48

Les médecins de ville s'inquiètent du manque d'attrait de leur profession mais tous les voyants ne sont pas au rouge. En pleine négociation avec les syndicats de médecins sur leur rémunération et leurs conditions d'exercice, l'Assurance Maladie a publié ces derniers jours une série de statistiques sur la démographie et l'activité des généralistes libéraux. Des données clés pour les discussions, qui se poursuivaient ce mercredi.

Si elles permettent de démonter certaines idées reçues, elles mettent aussi en lumière des changements dans la façon de travailler des médecins. Tour d'horizon.

· Les installations ont bondi de plus de 70 % en dix ans

Ces derniers mois, les syndicats ont multiplié manifestations et appels à la grève pour alerter sur leurs conditions de travail, qui dissuaderaient les jeunes médecins d'ouvrir leur cabinet, alors que les Français peinent souvent déjà à décrocher un rendez-vous. Ces dix dernières années, le nombre de généralistes ouvrant leur cabinet a cependant régulièrement augmenté. En 2022, quelque 2.360 généralistes se sont installés (primo-installations), un chiffre en hausse de plus de 70 % par rapport à 2012.

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· Les jeunes ouvrent leur cabinet quatre ans après leur thèse

Autre tendance réconfortante, les généralistes ont tendance à s'installer plus vite qu'il y a quelques années. Le délai moyen d'installation après la thèse est tombé à moins de quatre ans (3,8 ans) en 2023, alors qu'il était proche de six ans (5,9) en 2011. Quant à l'âge moyen des médecins généralistes nouvellement installés, il est passé de 37 ans en 2011 à 35 ans en 2023. « Cela va à l'encontre de toutes les idées reçues sur le fait que les jeunes ne s'installent pas et font des remplacements de plus en plus longtemps », salue la patronne du syndicat MG France, Agnès Giannotti.

· Le nombre de généralistes en recul de 3,5 % en dix ans

La tendance à la hausse du nombre d'installations ne suffit cependant pas à compenser les départs. Alors que plus d'un tiers des généralistes ont plus de 60 ans, le nombre de cessations d'activité par an a régulièrement augmenté pour atteindre 2.330 l'an dernier, soit un bond de 40 % en dix ans. Résultat : la population de généralistes libéraux a légèrement diminué de 3,5 % en dix ans, à 52.150. Une baisse contenue mais problématique, alors que les besoins de soins augmentent avec le vieillissement de la population.

· Les médecins partent en retraite à plus de 68 ans

Heureusement pour les patients, les généralistes ont tendance à partir en retraite de plus en plus tard. L'âge moyen de cessation d'activité est passé à un peu plus de 68 ans en 2022, contre un peu moins de 66 ans dix ans plus tôt. De quoi amortir un peu le choc des départs à la retraite. Des syndicats redoutent que nombre de médecins jettent l'éponge avant la retraite, lassés de conditions de travail harassantes. L'Assurance Maladie objecte que le nombre d'arrêts d'activité sans motif déclaré est resté constant ces dernières années (autour de 600).

· La part des généralistes libéraux s'est stabilisée à 66 %

Autre inquiétude des libéraux : le manque d'attrait de l'exercice en ville par rapport au salariat. Des syndicats redoutent que les jeunes médecins préfèrent travailler moins intensivement en salarié, notamment dans des centres de soins accueillant les urgences mais où les patients ne seraient pas suivis au long cours. Une alerte à relativiser. La part des généralistes travaillant en libéral (activité exclusive ou mixte) a certes légèrement baissé en dix ans (de 68 % à 66 % en 2023). Toutefois, elle s'est stabilisée ces dernières années.

· Le nombre d'actes réalisés a baissé de 3 % depuis 2016

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En moyenne, un médecin généraliste voit plus de 1.700 patients au moins une fois par an. Et ce nombre de patients (en file active) a augmenté de 5 % depuis 2016. Dans le même temps, le nombre d'actes cliniques réalisés par médecin a baissé de près de 3 %. Autrement dit, les médecins auraient tendance à voir plus de patients mais moins souvent.

« On s'est adaptés à la pénurie médicale, on fait des ordonnances pour plus longtemps, on revoit les gens moins souvent », explique Patricia Lefébure du syndicat FMF. Le phénomène n'est pas mal vu. « On peut espacer les consultations et travailler en lien plus étroit avec d'autres professions de santé », défend Franck Devulder de la CSMF.

· Un quart des médecins voient plus de 2.000 patients par an

Les médecins sont loin d'avoir tous le même rythme. En 2022, 25 % des généralistes avaient vu plus de 2.000 patients dans l'année (file active). A l'autre bout du spectre, 25 % des médecins avaient reçu moins de 1.170 patients. Les écarts entre professionnels sont aussi marqués pour le nombre de patients suivis de façon régulière.

Le gouvernement souhaitant augmenter le nombre des Français suivis par un médecin traitant, l'un des enjeux de la négociation en cours est de déterminer comment inciter financièrement les médecins à opter autant que possible pour un suivi rapproché, et non pas pour des consultations sans lendemain. « Il faut revaloriser la fonction médecin traitant », insiste Agnès Giannotti chez MG France.

· Les jeunes généralistes réalisent en moyenne 600 moins d'actes que les médecins installés depuis plus longtemps

Les généralistes installés entre 2016 et 2019 réalisent 4.660 actes cliniques en moyenne par an. Soit près de 600 de moins que ceux qui sont installés depuis bien plus longtemps (entre 1982 et 2001). Une tendance qui pour certains reflète un changement d'approche des jeunes générations vis-à-vis du travail. « Les jeunes globalement ont des durées horaires de travail moins importantes que les anciens médecins », estime Patricia Lefébure. « Mais ils ont aussi des durées de consultation plus longues ».

Solenn Poullennec

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