Dans la lettre que Gabriel Attal a adressée aux enseignants le 5 décembre 2023 pour leur présenter les mesures de son « choc des savoirs », le ministre de l’éducation nationale a formulé une promesse : « Ce sont désormais les notes que vous attribuez, et elles seules, qui détermineront l’obtention [des examens] par nos élèves. » Un engagement qui se traduit dans les annonces ministérielles par la suppression, « dès la session 2024 du brevet et du baccalauréat », du « correctif académique » qui, selon les mots du ministre, « réévalue artificiellement la valeur » des notes mises par les correcteurs aux épreuves finales des examens.
Ainsi formulée, la décision a suscité circonspection et incompréhension parmi les enseignants et les inspecteurs, mobilisés chaque année pour les corrections d’examens. « On ne sait pas vraiment de quoi il parle en évoquant des “correctifs académiques” », admet Eric Nicollet, à la tête du SUI-FSU, deuxième syndicat d’inspecteurs. Certains y ont vu, non sans inquiétude, l’annonce de la suppression des procédures d’harmonisation.
Après chaque épreuve d’examen, des inspecteurs et des professeurs se réunissent pour corriger des copies dites « témoins » et affiner le barème et les consignes nationales de correction délivrées par les commissions d’entente. S’il est par exemple constaté qu’un énoncé a été mal compris par les candidats, car mal formulé ou ambigu, les enseignants peuvent être invités à en tenir compte dans leur évaluation. Des commissions d’harmonisation s’assurent ensuite, une fois les corrections terminées, que les moyennes ne varient pas de manière inexpliquée entre chaque correcteur, ou entre les territoires.
« Si vous avez une moyenne trop différente des autres, un inspecteur risque de vous demander ce qu’il se passe, pour vérifier si c’est parce que vous avez eu un très bon ou un très mauvais lot, détaille un correcteur du baccalauréat, qui a souhaité rester anonyme. Le correcteur peut choisir de ne rien changer, mais si la commission juge qu’il y a une anomalie qui ne relève pas du niveau des copies, elle peut l’inciter à revoir ses notes. »
Pratique peu connue des correcteurs
« Tout ce travail est normal car tous les correcteurs ne travaillent pas de la même manière, insiste M. Nicollet. C’est indispensable pour s’assurer qu’il n’y a pas d’iniquité de traitement entre les candidats, encore plus depuis qu’il y a deux sujets par épreuve de spécialité au baccalauréat et que tous les candidats ne passent pas le même. »
Il n’est cependant pas question de toucher à ces procédures d’harmonisation, assure le directeur général de l’enseignement scolaire (Dgesco), Edouard Geffray. Le ministère de l’éducation entend veiller à ce qu’il n’existe pas de « consignes académiques » qui viendraient « assouplir » les consignes nationales de correction du bac et du brevet, mais le « correctif académique » évoqué par Gabriel Attal fait référence à une autre pratique, peu connue des correcteurs. « Il s’agit de mettre fin à la possibilité qui existe, pour les recteurs, de rehausser la moyenne de tous les candidats après harmonisation, en ajoutant par exemple un point à tout le monde, pour augmenter les taux de réussite d’une académie », explique M. Geffray.
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