Logistique : travaux en cours !

Fin décembre, le quatrième comité interministériel de la logistique a permis de dresser un bilan de la première année de mise en œuvre de la stratégie nationale de la logistique, qui vise notamment le verdissement de la filière. Un chemin qui s’annonce d’autant plus long que la demande de transport de marchandises, hors transit, devrait progresser en France d’environ 12% d’ici 2050, selon la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM).

Tenu le 22 décembre dernier, le quatrième comité interministériel de la logistique (Cilog) a permis de tirer un bilan de la première année de mise en œuvre de la stratégie nationale de la logistique présentée lors du Cilog de 2022 (voir notre article du 13 décembre 2022), et de dessiner de nouvelles perspectives. Au cœur de tous les enjeux actuels – décarbonation des transports, désartificialisation des sols, désintermédiation et ré-intermédiation du commerce… –, la logistique a beau être méprisée (voir notre article du 14 mars 2023), elle n’en reste pas moins incontournable. Si besoin était, pandémie et guerre l’ont récemment mis en lumière.  

Des conférences régionales en ordre de marche

Côté collectivités, 2023 aura notamment été marquée par l’organisation, dans toutes les régions métropolitaines, d’une première (au moins) conférence régionale de la logistique (CRLOG), organisée par le préfet de région, en lien avec le président du conseil régional. L’instruction aux préfets portant sur l’organisation de ces conférences sera actualisée cette année afin de préciser les actions de suivi pouvant être mises en place – les territoires les plus avancés devant être incités à structurer leur démarche dans une feuille de route adaptée aux spécificités de chaque territoire. L’accent sera notamment mis sur les "travaux de caractérisation des besoins en foncier industriel et logistique au soutien de la politique de réindustrialisation", dans la droite ligne du rapport Mouchel-Blaisot remis en juillet au gouvernement (voir notre article du 26 juillet 2023). "La pénurie d’entrepôts est une réalité qui commence à toucher certaines régions françaises", alerte ainsi Anne-Marie Idrac, présidente de France Logistique.

Hausse de la demande de transport de 12% d’ici 2050

Nul doute que ces CRLOG ne manqueront pas de regarder de près l’étude conduite l’an passé par la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGTIM) – et dévoilée lors du quatrième Cilog – selon laquelle la demande de transport de marchandises (hors transit) pourrait augmenter en France d’environ 12% à l’horizon 2050, notamment portée par la réindustrialisation. Une étude que l’État prévoit d’ailleurs "d’affiner et de territorialiser" cette année, et qui viendra compléter les données de l’observatoire national de la logistique mis en œuvre par l’université Gustave-Eiffel à la demande de l’État lors du deuxième Cilog (voir notre article du 21 octobre 2021), et qui devrait lui-même être enrichi en 2024. 

Tous les modes de transport à contribution

Alors que la stratégie nationale de la logistique vise tout particulièrement le verdissement de la filière, le gouvernement n’a pas manqué de relever les progrès réalisés en matière d’électrification des poids lourds – l’une des pistes, mais pas la seule, proposée par la filière dans sa proposition de feuille de route de décarbonation remise en mai dernier au gouvernement (voir notre article du 25 mai 2023) : 1.073 véhicules ont été financés grâce à l’appel à projets de l’Ademe "Écosystème des véhicules lourds électriques", "à l’heure où seulement 661 poids lourds électriques sont en circulation", se félicite-t-il. Pour accélérer le mouvement, l’appel est reconduit en 2024, avec une enveloppe plus que doublée (130 millions d’euros, contre 60 millions l’an dernier).

La décarbonation des bateaux est également visée. Elle devrait d’ailleurs faire partie des quatre objectifs prioritaires – avec l’augmentation de la part modale, le développement du transport de voyageurs et de la logistique urbaine et le "renforcement de la voie d’eau au service de l’industrie et de l’aménagement du territoire" – de la "stratégie nationale fluviale" dont l’État entend se doter cette année. À noter également que le jour même du Cilog, a été signé un avenant au contrat d’objectif et de performance de Voies navigables de France "pour accroître ses efforts".

Par ailleurs, à côté du développement de l’axe Méditerranée Rhône-Saône – une mission pour établir des propositions de renforcement de la gouvernance de cet axe afin de développer le transport massifié sur le Rhône devrait remettre ses propositions sous peu –, sera étudiée l’opportunité de structurer un nouvel axe de coordination interportuaire et logistique Grand Est. Une mission de préfiguration a été confiée à la préfète de région.

Côté ferroviaire, 2024 devrait voir aboutir, d’une part, le schéma directeur national du transport combiné– qui vise à planifier les renforcements de niveau de performance des infrastructures dédiées à ce transport et les créations/extensions/modernisations de terminaux aux horizons 2023 et 2040 – et, d’autre part, la stratégie d’aménagement du réseau ferré national pour le transport de semi-remorques.

Future "dépénalisation de l’aire de livraison" ?

Le deuxième Cilog avait missionné le Gart sur l’extension de la dépénalisation du stationnement aux aires de livraison – promue par la mission LUD (voir notre article du 1er décembre 2021) et soutenue par le rapport sénatorial Filleul/Herzog (voir notre article du 31 mai 2022) – afin, entre autres, de permettre un usage mixte (voiture la nuit, livraisons le jour) et des tarifications différenciées suivant la motorisation. Depuis, le dossier progresse lentement. La DGTIM a lancé le 1er mars dernier le déploiement progressif de la base de données nationale des arrêtés de circulation et des aires de livraison, via sa start-up DiaLOG. En 2024, la direction devrait élaborer une "proposition de texte expurgé des réserves juridiques" pour être soumis à consultation. Le projet proposerait de rendre obligatoire l’utilisation d’un disque papier (comme en zone bleue) ou numérique. 

Nouvel appel à projets Logistique 4.0

Lancé lors du deuxième Cilog, l’appel à projets Logistique 4.0 aura in fine désigné 30 lauréats – les 16 derniers l’ont été au cours de ce quatrième Cilog –, pour une aide totale de 68 millions d’euros. Après élaboration d’un nouveau cahier des charges à paraître au printemps, une nouvelle édition sera lancée cette année, avec une enveloppe d’environ 20 millions d’euros tirée du programme France 2030.

 
  • Soutien à la logistique urbaine durable : d’InterLUD à InterLUD+

Le début de 2023 a également vu la signature des conventions de nouveaux programmes de certificats d’économie d’énergie (CEE) en faveur de la logistique urbaine durable : Cyclocargologie, pour le déploiement des vélos cargos ; Marguerite, pour aider la logistique des artisans et commerçants dans 6 métropoles et InterLUD, devenu InterLUD+. Doté de 20 millions d’euros sur 4 ans, ce dernier va désormais accompagner 61 établissements de coopération intercommunale (20 nouveaux territoires), notamment pour élaborer des chartes de logistique urbaine durable – une vingtaine devraient être adoptées ou signées d’ici mars prochain. "Les leviers d’action des collectivités ne sont pas que réglementaires ; ils sont incitatifs", insistent ses promoteurs, prenant appui sur une étude conduite par 4 chercheurs ayant examiné quelque 150 fiches actions et expérimentations lancées par 16 territoires accompagnés par InterLUD (parmi lesquelles aides au verdissement des flottes, établissement de critères pour l’attribution des marchés publics, etc). Des travaux qui soulignent par ailleurs l’importance de la place du référent logistique, du partage des bonnes pratiques ou encore de l’établissement d’indicateurs pour mesurer les progrès et pérenniser les actions.

Le nouveau programme prévoit, entre autres mesures, le déploiement des services numériques expérimentés dans le précédent : ZFE.green pour faciliter la recherche d’itinéraires pour les entreprises dans les zones à faibles émissions-mobilités (ZFE-m) et DeliveryPark pour la gestion physique et immatérielle des aires de livraison. Deux outils qui seront notamment déployés lors des Jeux Olympiques et Paralympiques, un "défi majeur" compte tenu des 185 km de voies réservées, des multiples périmètres de sécurité instaurés et du doublement attendu des flux logistiques (entre 1,7 et 2,2 fois plus selon les études). 

Le programme a enfin revu sa gouvernance, en incluant ses partenaires – collectivités d’un côté, fédérations et associations professionnelles de l’autre – dans des comités techniques de liaison en logistique urbaine durable. Consultés 4 fois par an, ces derniers auront pour mission de faciliter le déploiement du programme auprès de ses utilisateurs.