« Je suis dos au mur. » « Je n’ai pas les moyens de financer ma formation. » « Je regrette d’avoir repris mes études en alternance. » Un nouveau type de témoignages a fait son apparition sur la plate-forme SOS Apprenti. Le tchat en ligne, géré par des salariés de l’Association des apprentis de France (ANAF), regorge de récits de jeunes sommés de rembourser une partie, voire l’intégralité, de leurs frais de scolarité en école de commerce, alors même qu’ils suivent leur cursus en apprentissage, censé les exonérer de tout coût. « On avait très peu d’appels à l’aide avant la réforme de l’apprentissage. Depuis 2018, on en a beaucoup », résume Aurélien Cadiou, président de l’ANAF.
En simplifiant l’accès à l’apprentissage, la loi « avenir professionnel » de 2018 a contribué à la démocratisation de ce dispositif dans l’enseignement supérieur. La Conférence des grandes écoles a même publié, en 2022, un baromètre sur le sujet. On y apprend que 81 % des grandes écoles proposent au moins une formation en apprentissage et que les apprentis représentent un quart des effectifs des établissements qui ont opté pour cette formule. Mais la qualité des formations peut être défaillante, comme l’accompagnement des élèves, qui est parfois inexistant, notamment dans les écoles de management.
Après un BUT techniques de commercialisation, Mélissa vise une école de gestion. La jeune femme de 24 ans, qui souhaite garder l’anonymat, se laisse séduire par un nouvel établissement à la communication tapageuse. Originaire d’Auvergne, elle doit trouver un apprentissage si elle veut financer ses études à Paris. « On m’a promis un suivi de qualité, un réseau de 200 entreprises partenaires. » Pourtant, Mélissa ne reçoit aucune offre de la part de son école. Elle envoie des centaines de candidatures. Sans succès. « J’ai fini par comprendre que de nombreux apprentis de l’école travaillaient… pour l’école ! Ils s’occupaient de la communication, des entretiens d’embauche… » Mélissa finit par renoncer et se contente de son bac + 3. Elle accepte un travail alimentaire et monte aujourd’hui son entreprise de graphisme.
Pratiques abusives
Confrontés à un manque d’accompagnement de la part de leur école, d’autres aspirants apprentis acceptent des contrats à la hâte. Quitte à les rompre tout aussi rapidement. « C’est ce qui explique, en partie, le taux de rupture de contrats, inquiétant dans certains domaines », estime Denis Poulain. Le directeur du centre de formation d’apprentis de l’Essec invite les étudiants à bien réfléchir avant de signer un contrat : « Discutez avec les anciens apprentis, ce sont les meilleurs ambassadeurs. Un apprentissage, ce n’est pas juste un moyen de faire ses études gratuitement. » Il insiste également sur la responsabilité des écoles, tenues d’assister les apprentis, avant même la signature du contrat.
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