Ce surnom, Michel L’Hour ne l’a pas usurpé : l’« Indiana Jones en combinaison de plongée ». Comme l’aventurier au fouet, cet archéologue des profondeurs est un bourlingueur à l’humour narquois, doublé d’une sommité dans son domaine : hier patron du département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm), aujourd’hui membre de l’Académie de marine. Comme le docteur Jones de Spielberg, il lui a aussi fallu prendre sa retraite, mais sans pour autant renoncer à retrouver son arche perdue à lui : le trésor de Lava, un butin romain échoué à quelques brasses du rivage corse, au nord d’Ajaccio.
Disparues, la plupart des pièces d’or (1 400, selon certaines estimations) frappées au IIIe siècle ap. J.-C. Evaporées, la dizaine de bracelets et d’anneaux et la statuette d’un jeune garçon, en or massif, eux aussi. « On ne connaîtra jamais l’ampleur réelle, ni le catalogue exact, de ce qui fut un monument archéologique de premier ordre », regrette la chercheuse Sylviane Estiot, autrice du Trésor d’or romain de Lava (Revue numismatique, 2012).
Michel L’Hour a beau avoir 69 ans et des souvenirs de plongée dans le monde entier, ce dossier le hante plus que tout autre. « L’affaire n’est pas finie », martèle-t-il. De fait, la saga n’est pas close. Les 29 et 30 janvier se tiendra à Marseille le procès d’un homme de 66 ans, Félix Biancamaria, accusé d’avoir tenté de monnayer l’une des merveilles de Lava : un plat en or de 879 grammes, estimé à plusieurs millions d’euros. Ce Corse, déjà condamné en 1994 pour le recel de monnaies de la même provenance, a inspiré au réalisateur Eric Fraticelli une comédie, sortie en salle le 1er novembre, Inestimable. Le film n’a pas du tout fait rire Michel L’Hour. Cette affaire, c’est l’histoire de sa vie ; il en connaît les moindres détails…
Lava, donc. Avant d’être un trésor, c’est une baie de rêve au nord d’Ajaccio, entre mer et maquis. Michel L’Hour a exploré ces fonds à maintes reprises, seul avec ses bouteilles de plongée, puis à bord de l’André-Malraux, le bateau bourré d’électronique du Drassm. C’est là, suppute-t-on, qu’une galère romaine chargée d’or aurait jadis sombré, à moins qu’elle n’ait été victime d’une attaque de pirates.
Félix Biancamaria connaît bien les lieux, lui aussi, car sa famille y possède un cabanon. Un dimanche ensoleillé de septembre 1985, les Biancamaria se préparent à savourer des oursins. Avec son ami Marc Cotoni, Félix se charge d’aller les chercher. Près de la pointe de Pietra Piombata, l’œil aiguisé de Marc décèle un scintillement fugace au flanc d’un rocher. Ce jour-là, outre leurs casiers pleins d’oursins, les deux copains rapportent trois pièces d’or aux inscriptions latines en partie masquées par les concrétions.
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