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TRIBUNE

Réforme des collèges : les premiers resteront les premiers

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La décision de séparer les collégiens en français et en maths est non seulement stigmatisante et arriérée mais surtout inefficace, dénonce Amélie C, professeure de français en collège. Sous couvert de se préoccuper des plus faibles, elle favorise les plus forts.
par Amélie C., professeure de lettres en collège
publié le 4 février 2024 à 12h24

A la rentrée prochaine, les élèves de 6e et de 5e seront répartis en groupes de niveaux en français et en mathématiques. Puis, ce sera le tour des classes de 4e et de 3e l’année suivante. C’est la nouvelle réforme annoncée… dans l’indifférence totale. Pourtant, elle a des implications titanesques sur le collège.

Concrètement, on mettra les meilleurs avec les meilleurs dans un groupe qui ira souvent jusqu’à 30 élèves, les moyens avec les moyens dans un autre groupe de 30, et les élèves en grande difficulté entre eux dans un groupe de 15/16. Le gouvernement semble croire que le simple fait de nommer les groupes «1, 2, et 3» suffira à masquer la réalité des faits. Celle qui stigmatise l’élève en difficulté, lui imprime sur le front l’étiquette de «nul», qui l’enferme aussi dans ses difficultés avec toutes celles des autres.

Car ne vous y trompez pas, s’y rassembleront en majorité les troubles du comportement, de l’attention, les «troubles dys» [qui regroupent la dyslexie, la dyspraxie, la dyscalculie ou la dysphasie, ndlr], les enfants en détresse sociale, les porteurs de certains handicaps… des élèves qui ne seront plus tirés vers le haut par d’autres, ne seront pas intégrés, qui baigneront non-stop dans leurs problèmes. Ces élèves seront malheureusement pointés du doigt, ce qui donne toutes les billes aux harceleurs.

La ségrégation scolaire organise les funérailles de l’estime de soi, à un âge où cette dernière se construit et où elle est aussi au cœur des apprentissages.

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