Amiens : un micro-collège pour "réapprendre à être élève"

Avec une quinzaine d'élèves par classe, le micro-collège peut prendre en charge les adolescents individuellement. ©Radio France - Cécile Bidault / France Inter
Avec une quinzaine d'élèves par classe, le micro-collège peut prendre en charge les adolescents individuellement. ©Radio France - Cécile Bidault / France Inter
Avec une quinzaine d'élèves par classe, le micro-collège peut prendre en charge les adolescents individuellement. ©Radio France - Cécile Bidault / France Inter
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C'est ce que l'Education nationale appelle des structures de retour à l'école. Dans l'Académie d'Amiens, deux micro-collèges accueillent des adolescents en rupture avec l'institution. De petits effectifs et une pédagogie adaptée à chaque élève leur permettent de reprendre goût aux apprentissages.

C'est un collège public, à Amiens. Jusqu’ici, rien d’original : nous passons la grille du collège Guy-Mareschal dans les quartiers Sud-est de la ville. Mais une partie du bâtiment est réservée au micro-collège : deux salles de classe et une salle de vie, pour 34 élèves de 4e et de 3e.

Lorsque nous arrivons, nous tombons sur l’heure quotidienne de Travail en classe (TEC), un moment pour reprendre les leçons, faire les devoirs, de façon individualisée. Car les adolescents du micro-collège ont une relation difficile avec l’école : phobie scolaire, anxiété, harcèlement, des situations qui les ont conduits à l'absentéisme. "Je n'allais plus en cours" raconte Emma, en 4e, "j'ai fait une phobie scolaire,  j'étais totalement en décrochage". Louise exprime aussi son mal-être, dans son ancien collège : "c'était très stressant, je faisais des malaises en cours. Là ça va beaucoup mieux depuis que je suis avec moins de monde".

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Les élèves bénéficient d'une heure quotidienne de TEC, travail en classe, pour revoir les leçons et identifier ce qui n'a pas été compris.
Les élèves bénéficient d'une heure quotidienne de TEC, travail en classe, pour revoir les leçons et identifier ce qui n'a pas été compris.
© Radio France - Cécile Bidault / France Inter

Objectif : le brevet et une orientation, à petit pas

Ils sont en effet 17 élèves par classe (la moitié de l'effectif habituel), encadrés par 10 enseignants. L'emploi du temps est condensé, la cantine décalée, il n'y a aucune obligation de partager la cour de récréation avec les autres collégiens. "Il faut réapprendre à devenir élève", analyse Emma Croisé, la coordonnatrice du micro-collège d’Amiens, "réapprendre à vivre une journée de cours complète. Et puis après, on réapprend à prendre du plaisir à apprendre, à croire en soi, et à imaginer que l'avenir n'est pas bouché, qu'il y a un horizon, une voie qui va nous plaire. L'objectif, sur les deux ans, c'est de se diplômer et de s'orienter, mais c'est du tout petits pas".

Une "vraie relation" prof-élèves

Lors du cours de mathématiques, le professeur passe de table en table, à côté des élèves, qui peuvent tutoyer les enseignants et les appeler par leurs prénoms. "C'est nous qui choisissons si on les appelle Madame ou Monsieur, ou par leur prénom", explique Nathan, "ça crée d'autres liens".

Lila, en 3e, confirme : "ils s'ajustent par rapport à nous, ils nous donnent ce dont on a besoin. C'est une vraie relation, ce n'est pas juste quelqu'un qui vient dans ta salle parce qu'il est payé pour ça". Une fois l'interview terminée, la jeune fille demandera à aller courir dehors pour se "calmer" avant de reprendre le cours. Au micro-collège, il n’y a pas de notes, mais des codes couleurs pour valider l’acquisition des compétences.

Académie pionnière

Il existe une soixantaine de  Structures de retour à l'école (SRE) en France. Dans l’Académie d’Amiens, pionnière en la matière, il y a  deux micro-collèges et trois micro-lycées. Philippe Deliginières, qui les coordonne, analyse leur développement : "un certain nombre d'événements récents ont mis un focus sur ces jeunes que j'appelle 'empêchés', comme le Covid, qui a été une forme de révélateur, d'amplificateur de ces difficultés. Cela nous a montré à nous, institutions, qu'il fallait qu'on invente de nouvelles prises en charge éducatives globales. C'est un enjeu sociétal".

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L’an dernier, 15 des 17 élèves de 3e du micro-collège d'Amiens ont pu être orientés, notamment en seconde. "Ils nous poussent vraiment vers le haut", constate Luna en souriant, "pour certains, l'ego est peut-être un peu trop reboosté ! Mais oui, être ici, ça redonne beaucoup de confiance en soi". Et Ysalis, arrivée au micro-collège d'Amiens après deux ans sans pouvoir aller en cours, de conclure : "ça a été un soulagement quand j'ai su que j'allais aller au micro-collège, ça me donne une chance de me réintégrer. Parmi tous les enfants déscolarisés, on a vraiment une chance incroyable d'être ici. Merci le micro-collège !"

Un troisième micro-collège doit ouvrir en septembre 2024 à Beauvais.

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