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EDF rechargé par un bénéfice record de 10 milliards d’euros en 2023

Grâce au redémarrage de plusieurs réacteurs et à la fin des mesures de limitation des tarifs, le groupe, détenu à 100 % par l’Etat depuis juin, a vu sa production d’électricité repartir et est redevenu (très) bénéficiaire, après une année noire en 2022.
par Laurence Benhamou
publié le 16 février 2024 à 7h55

L’année 2023 s’achève très bien pour EDF – l’entreprise a vu son bénéfice net grimper à 10 milliards d’euros, un record. Grâce au rebond de sa production et de ses tarifs, elle repasse au vert après une année 2022 catastrophique, marquée par une perte historique de presque 18 milliards d’euros. La faute aux défaillances d’une bonne partie de ses réacteurs, arrêtés pour des problèmes de corrosion, et aux mesures du gouvernement pour limiter la hausse des tarifs de l’électricité, qui avaient obligé le groupe à vendre du nucléaire à bas prix à ses concurrents.

Depuis, 15 réacteurs ont été réparés sur les 16 les plus sensibles et le programme de contrôle des soudures – le point faible des réacteurs nucléaires – est achevé. Résultat, l’an dernier, sa production d’électricité nucléaire est remontée à 320 térawatt-heures (TWh), contre le maigre score de 279 TWh de 2022. Et pour 2024, le nouveau PDG Luc Rémont table sur 315 à 345 TWh. Ce qui reste inférieur aux 361 TWh atteints en 2021, a-t-il reconnu, mais lui permet de confirmer le cap des 400 TWh à l’horizon 2030, l’objectif fixé par l’Elysée. «Nous allons remonter le niveau de production pour tendre vers 400 TWh, mais il faut y aller graduellement, et aussi réussir les chantiers de grand carénage» – autrement dit, la remise en état du parc pour prolonger sa durée d’opération. D’ores et déjà, «EDF est le premier producteur mondial d’électricité décarbonée et pilotable à la demande», s’est-il félicité. Au passage, EDF a récupéré l’an dernier 1 million de nouveaux clients particuliers, qui sont revenus vers l’opérateur historique lorsque plusieurs fournisseurs alternatifs ont mis la clé sous la porte. L’Etat actionnaire n’a pas demandé de dividendes.

Investissements massifs

Cette amélioration des comptes ne sera pas de trop pour permettre à l’énergéticien, encore plombé par une lourde dette – pourtant ramenée de 64 à 54 milliards –, d’affronter les défis gigantesques qui l’attendent. Dont le check-up géant de ses centrales, mais aussi les projets de constructions nouvelles. Le chef de l’Etat avait réclamé en février 2022 la construction de six réacteurs EPR, plus huit en option, ainsi que la prolongation du parc existant. Début 2024, Emmanuel Macron a confirmé que ce seront bien quatorze réacteurs qui devront sortir de terre. Et qu’il faudra financer.

L’année 2023 avait pourtant mal commencé, avec un nouveau retard de l’interminable chantier du seul EPR en construction en France, à Flamanville (Manche). Cette année devrait être la bonne : son raccordement au réseau est prévu pour cet été. Entre mi-2024 et 2026, Flamanville devrait produire 14 TWh. Par précaution, les prévisions de production d’EDF ne comprennent pas ce futur apport. EDF compte aussi démarrer cette année les travaux de terrassement de deux autres réacteurs EPR2 sur le site de Penly.

Début 2024, il a cependant annoncé un nouveau revers : un retard de deux à quatre ans et un surcoût d’au moins 7 milliards d’euros pour le réacteur EPR qu’il construit au Royaume-Uni, à Hinkley Point, chantier qu’il finance lui-même, après le retrait de son partenaire chinois. Sans cette mauvaise nouvelle, son bénéfice aurait été nettement plus élevé. Des discussions sont en cours avec le gouvernement britannique pour voir s’il peut aider au financement. «J’ai confiance que nous allons trouver un chemin avec les autorités britanniques», a lâché Luc Rémont sans autres détails.

«Nous voulons préparer le futur décarboné et électrique, en France et dans les pays que nous servons. Il ne nous est pas permis de se relâcher, car nous avons devant nous une nécessité très forte d’investissements, dans un environnement de baisse des prix», a lancé le PDG devant la presse vendredi.

A long terme, l’ambition est énorme : Luc Rémont a récemment annoncé vouloir passer d’un ou deux réacteurs construits par décennie à «un à un et demi par an» en Europe au cours des dix prochaines années. Il espère les vendre à des pays comme le Canada, l’Inde et la République tchèque. EDF vient d’être sélectionné par Prague pour la nouvelle étape d’un appel d’offres portant sur plusieurs réacteurs.

Autre projet, le groupe veut développer des Small Modular Reactors, ou SMR, des petits réacteurs de moins de 300 mégawatts. Il fait face aux groupes américains et chinois, mais Bruxelles doit concrétiser cette année une alliance industrielle européenne sur les SMR.

Enfin, même si le nucléaire représente près de 80 % de sa production, EDF compte développer l’éolien offshore et le solaire. Il est chargé de cinq des huit parcs d’éoliennes en mer en développement en France et ses installations de toitures photovoltaïques chez les professionnels et les particuliers ont bondi de 60 %, un fort engouement.

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