Qualité de vie dans les villes européennes : Marseille et Paris à la traîne

Une étude de la Commission européenne sur la qualité de vie dans les villes d’Europe relève qu’elle semble plus grande dans les petites villes, notamment celles d’Europe de l’Ouest. De fortes disparités au sein d’un même pays sont toutefois observées, en particulier en France. Rennes, Strasbourg et Bordeaux se distinguent ainsi souvent positivement, Lille restant plutôt dans la moyenne. En revanche, Paris et Marseille sont fréquemment en queue de classement.

Les études se suivent et se ressemblent : en matière de qualité de vie, les grandes villes n’ont pas la cote. Après le palmarès des "villes et villages où il fait bon vivre en France" (voir notre article du 26 janvier), c’est ce que confirme une étude récemment publiée par la Commission européenne qu’elle a conduite auprès de 83 villes européennes (incluant le Royaume-Uni, la Suisse, la Turquie…), à une tout autre échelle (pour la France, sont examinées Bordeaux, Lille, Marseille, Rennes, Strasbourg et le Grand Paris). Autre constat, la satisfaction des citadins a globalement décru depuis 2019, date de la précédente enquête. Entre-temps, le Covid est passé par là… 

Là aussi, c’est mieux à l’Ouest !

Globalement, les plus petites villes (moins de 250.000 habitants) sont perçues comme plus favorables aux personnes âgées et aux familles avec de jeunes enfants, mais aussi plus sûres, plus propres et moins bruyantes. Indépendamment de la taille de la ville, le taux de satisfaction est globalement plus grand dans les villes de l’Europe de l’Ouest et du Nord (il est d’ailleurs relevé que le score des villes de plus 5 millions d’habitants est tiré vers le bas par Istanbul). C’est singulièrement le cas pour l’accueil des personnes LGBTIQ, domaine où la Turquie truste d’ailleurs les mauvaises places (3 des 4 plus mauvais résultats, aux côtés de Tirana).  

France, pays aux fortes disparités

Pour autant, l’enquête relève des différences significatives dans un même pays. C’est singulièrement le cas de la France, où Rennes, Strasbourg et Bordeaux font partie des bons élèves, avec un taux de satisfaction globale supérieur à la moyenne, à l’inverse de Paris et surtout de Marseille, Lille étant dans la moyenne.

Ainsi, Paris et Marseille sous-performent notamment au regard de l’accueil des personnes âgées (respectivement 64% et 72% d’opinions positives, contre 81% dans l’ensemble des pays de l’Europe de l’Ouest), alors que Strasbourg fait partie du top 10 des bons élèves (91%).

C’est également le cas à l’égard des familles avec de jeunes enfants : si Rennes se classe dans le top 10 (92% de satisfaits) – Bordeaux et Strasbourg dépassant également les 90%, et Lille étant au-dessus de la moyenne –, Paris est loin derrière, avec seulement 68% d’opinions positives.

Côté sécurité, les différences sont tout aussi sensibles : Marseille obtient le troisième plus mauvais résultat toutes villes confondues (43%), "bien en dessous de la moyenne des villes d’Europe de l’Ouest", loin des 82% d’opinions positives à Bordeaux. Le sentiment de confiance à l’égard des autres habitants est également faible dans la cité phocéenne (42%), comme à Paris (51%), les deux étant là encore en dessous de la moyenne des villes d’Europe de l’Ouest (en France, Strasbourg atteint le score le plus élevé, à 71%). 

La France est aussi le pays qui connait les plus grandes disparités à l’égard du sentiment de solitude (mal répandu – voir notre article du 31 janvier) : alors que Strasbourg obtient le deuxième meilleur score toutes villes confondues (5% des répondants ayant éprouvé ce sentiment dans les 4 dernières semaines, contre 13% en moyenne dans l’ensemble des villes étudiées), juste derrière Luxembourg, Lille obtient au contraire le cinquième plus mauvais score (20%).

C’est encore le cas avec l’accès aux espaces publics, où Strasbourg (89% de satisfaits) et Rennes (88%) se classent dans le top 10 des bons élèves, talonnées par Bordeaux, alors que Marseille dépasse à peine les 60% (Paris et Lille se situant dans la moyenne, de 76%).

Enseignement plus étonnant dans le pays du "quoi qu’il en coûte", les citadins français sont plutôt moins enclins que les autres à considérer qu’"ils recevront une aide matérielle en cas de besoin" (surtout à Bordeaux, Marseille, Paris et Lille).

Les villes-capitales sous-performent

De manière générale, l’enquête constate que les villes-capitales sont généralement plus mal notées, indépendamment de leur taille. C’est notamment le cas en matière d’accès au logement (Paris obtenant le septième plus mauvais score), à la santé, aux espaces publics ou à l’administration publique locale (un domaine où Strasbourg atteint un taux de 70% de satisfaits, la classant à la huitième meilleure place toutes villes confondues). Cela se vérifie également à l’égard des équipements culturels, le taux de satisfaction étant plus important dans les villes non-capitales (Paris n’étant toutefois pas dans ce cas). Il est de manière générale beaucoup plus important dans l’Europe du Nord et du Centre. En France, Strasbourg (91% de satisfaits) tire particulièrement son épingle du jeu.

Les villes-capitales enregistrent en outre un score plutôt médiocre pour l’accueil des migrants, Paris figurant même ici en queue de classement : troisième plus mauvais résultat toutes villes confondues, avec 54% d’opinions positives seulement, contre 75% à l’échelle nationale. Sans qu’il n’y ait toutefois de fatalité, puisque Londres et Madrid obtiennent d’excellents résultats dans ce domaine.

En revanche, on y utilise moins la voiture – Paris est la deuxième ville dont les habitants y recourent le moins (31%) derrière Stockholm – et davantage les transports publics (8 capitales dans les 10 meilleurs résultats), Paris se classant ici encore à la deuxième place (62%), derrière Prague. Pour autant, la satisfaction à l’égard de ces transports publics y est plus mauvaise que dans les villes non-capitales. En France, elle est particulièrement bonne à Strasbourg (87%, dans le top 10), mais aussi à Rennes, et dans une moindre mesure à Bordeaux et Lille. Elle est au contraire plutôt mauvaise à Marseille. Tout sauf un détail alors que "le jugement sur les transports publics aurait une grande influence sur la satisfaction globale des habitants à l’égard de leur ville". On relèvera sans surprise que pour l’utilisation du vélo, les Pays-Bas trustent 4 des 5 premières places (au point de donner des complexes – voir notre article du 31 janvier).

La taille joue beaucoup

La marche, qui fait une percée (la distanciation Covid ayant sans doute joué), croît, elle, avec la taille de la ville – et c’est à Paris qu’on marche le plus. Comme l’insatisfaction à l’égard de la qualité de l’air : Paris est ici le quatrième plus mauvais élève (26% de satisfaits, 28% à Athènes, mais 89% à Zurich), très loin de Rennes et de ses 73% de satisfaits. On relèvera qu’entre 2019 et 2013, Bordeaux aura vu son taux de satisfaction reculer de 9 points en ce domaine. 

À noter que comme avec les transports publics, la satisfaction générale augmente avec l’accès à des espaces verts (là encore moins élevée dans les villes-capitales). En l’espèce, Marseille se démarque négativement, obtenant un bien plus mauvais taux de satisfaction (65%) que la moyenne des villes d’Europe de l’Ouest (84%). À l’inverse, Rennes se classe dans le top 10 (89%).

Marseille, sale et corrompue ?

De même, plus les villes sont grandes, plus elles sont jugées bruyantes (43% de satisfaits à Paris, dans le top 10 des plus mauvaises élèves) et sales. Côté propreté, Marseille se démarque encore négativement, puisque prenant la troisième plus mauvaise place (22% de satisfaits) derrière Palerme et Rome. Paris fait aussi partie des 10 plus mauvais élèves dans ce domaine (36%), Rennes obtenant en France le meilleur résultat (75%). Relevons enfin que si les villes françaises font partie des villes perçues comme les moins corrompues (Rennes et Strasbourg se classant même dans le top 10 des bons élèves), une seule fait exception : Marseille, bien au-dessus de la moyenne.