Les baromètres des offres d’emploi publiées par les grandes plateformes numériques révèlent une année 2023 contrastée, avec un infléchissement négatif en fin d’année. Mais depuis le covid, le dynamisme des régions - notamment celles du Grand Sud – s’affirme.

En 2023, le marché de l’emploi hexagonal a connu des hauts et des bas. « Nous avons observé une évolution assez contrastée avec un début d’année plutôt dynamique, puis une amorce de ralentissement à partir du second semestre », résume David Beaurepaire, directeur délégué de Hellowork. Le baromètre de l’emploi 2023 réalisé par la plateforme française (1) précise : « Après un premier semestre euphorique avec 17% de croissance par rapport à 2022, le marché de l’emploi au second semestre a connu un ralentissement de la dynamique des recrutements. »

Une photographie de l’emploi conforme à celle réalisée par Leboncoin (qui a dévoilé son nouveau Baromètre de l’emploi le 13 février, le même jour que la publication de celui d’Hellowork) : « Après une forte augmentation des offres d'emploi en 2022, l'activité a maintenu son dynamisme jusqu'à mai 2023, pour ensuite revenir progressivement aux niveaux de 2022 en fin d'année. » Cette baisse s’explique par des facteurs tels que l’inflation, la réduction des coûts des entreprises et le gel des embauches, analyse Leboncoin.

Malgré l’infléchissement de cette dynamique de l’emploi, « nous restons toutefois dans des niveaux supérieurs à la période pré-crise sanitaire », souligne David Beaurepaire de Hellowork. « Il y a de moins en moins de créations d’emploi, mais de plus en plus de mobilité, pas tant géographique que professionnelle », complète-t-il.

Paris en érosion

Les conséquences des épisodes covid se font encore sentir sur le marché de l’emploi. Avec le télé travail et le travail à distance, de nombreux talents n'hésitent plus à quitter la région parisienne. Dans le secteur de la communication, notamment, la prééminence de Paris est en train de s’éroder au profit des territoires méridionaux. Un phénomène qui touche bien des secteurs dans les services. « Le principal enseignement de 2023, c’est l’érosion de la place de Paris », confirme Alexandre Judes, économiste et responsable du Hiring Lab chez Indeed. « Depuis la pandémie, l’augmentation du volume d’offres d’emploi à Paris à été très inférieure à la moyenne nationale. Un phénomène que l’on observe dans d’autres pays d’Europe, en Grande-Bretagne ou en Allemagne... ».

En termes de volume d’emplois, la région île-de-France regroupe 16% des offres diffusées, suivie d’Auvergne-Rhône-Alpes (14%), grâce à Lyon,  puis des Pays de la Loire et de la Nouvelle-Aquitaine (10% chacune), recense Hellowork . Un constat qui cache une tendance clairement engagée depuis la pandémie : le dynamisme de l’emploi en région, tout particulièrement celles de la façade atlantique et celles du grand Sud. « Bien que l’Île-de-France, la région AURA (Auvergne Rhône-Alpes, Ndlr) et la Nouvelle Aquitaine aient le plus grand nombres d’offres en volume, c’est la région Pays de la Loire qui se hisse sur le podium des régions qui recrutaient le plus (par habitant, Ndlr) en 2023 ! », souligne Leboncoin dans son baromètre.

Si l’on zoome un peu plus sur les territoires, l’analyse d’un essor de l’emploi en région se confirme. Parmi les 20 plus grandes métropoles, l’axe PLM domine toujours en matière de volume d’emploi : « le Grand Paris reste celle qui propose le plus d’offres avec 29% du volume. La métropole de Lyon concentre 11% des propositions d’emplois et celle d’Aix-Marseille-Provence affichait 9% des offres », observe Hellowork. Mais la dynamique de l’emploi semble, là aussi, se déplacer vers le sud de la Loire : Grenoble-Alpes-Métropole (+34%), Montpellier Méditerranée Métropole et Toulouse Métropole (+30%), enregistrent les plus fortes augmentations d’offres diffusées en 2023 sur la plateforme. « Cette année, les villes moyennes (comme Caen ou Angers, Ndlr) tirent leur épingle du jeu », observe encore Hellowork.

La com s’installe en régions

En ce qui concerne les métiers du marketing et de la communication, l’année 2023 apparaît comme plutôt morose. « Tout un tas de métiers ne se sont pas relevés de la pandémie, plutôt parmi les métiers support : au sein des DSI, la finance, le marketing et la communication », constate Alexandre Judes. Alors que les métiers du soin et de la santé ou ceux du transport et de la logistique sont toujours en forte demande.

« Depuis avril 2023, on observe un effondrement des offres dans les métiers du marketing et de la communication », poursuit l’économiste d’Indeed. « Clairement, les budgets RH dans ces domaines se sont resserrés. Une compression liée aux incertitudes économiques, mais aussi à des rémunérations ou des avantages trop faibles, des conditions de travail – comme le télétravail - pas assez attractives, et à une pénurie de profils », analyse Alexandre Judes. Un constat globalement partagé par Hellowork : le volume d’offres liées à la communication a baissé de 8,7 % l’année dernière. « La fin d’année a été très notablement négative », remarque David Beaurepaire : les offres en baissé de 37 % en septembre (vs sept. 2022) et de 33 % en décembre.

« Dans le secteur de la communication, il y a vraiment Paris et le reste de la France », résume l’analyste d’Indeed. « Même, si depuis la pandémie, on constate une érosion de l’île-de-France. » Une érosion qui profite à la plupart des régions situées dans la moitié sud de l’Hexagone. En février 2024, 37 % des offres d’emploi sur Indeed émanaient de l’IdF (vs 60 % en 2020), suivi d’Auvergne-Rhône-Alpes (11% vs 9,6 % en 2020), de l’Occitanie (7,5% vs 5,6), de Paca (7,3% vs 5,3) et de la Nouvelle-Aquitaine (6,5% vs 4,4). Mais le Grand Est tire aussi son épingle du jeu dans cette dynamique régionale (5,7 % d’offres vs 3,7). Quarante ans après les lois Defferre, la décentralisation toucherait-elle enfin le secteur de la communication ?

(1) Plus de 9,6 millions offres d’emploi en CDI/CDD/alternance diffusées sur la plateforme du 1er janvier au 31 décembre 2023 ont été analysées.

Les régions qui recrutent le plus par habitant

1. Pays de la Loire

2. Auvergne Rhône-Alpes

3. île-de-France

4. Bretagne

5. Provence-Alpes-Côte d’Azur

6. Nouvelle Aquitaine

7. Centre-Val de Loire

8. Bourgogne Franche-Comté

9. Occitanie

10. Normandie

11. Grand Est

12. Hauts-de-France

Ratio du nombre d’annonces publiées sur tous les sites d’emploi en France (leboncoin, Pôle emploi, etc…) en 2023 / le nombre d’habitants déclarés au 1er janvier 2024 dans chaque région, source Leboncoin.