MétiersPourquoi le secteur du luxe galère à vendre ses emplois à la jeunesse

Pourquoi le secteur du luxe galère à vendre ses emplois à la jeunesse

MétiersLes grandes maisons visent la génération Z (nés entre 1995 et 2010), une clientèle qui adhère certes à leurs produits mais pas tellement à leurs offres de poste
Une photo prise lors de l'événement Les De(ux) mains du luxe, organisé par le Comité Colbert, le 14 décembre dernier à Station F.
Une photo prise lors de l'événement Les De(ux) mains du luxe, organisé par le Comité Colbert, le 14 décembre dernier à Station F.  - JEANNE ACCORSINI/SIPA / Sipa
Youssef Zein

Youssef Zein

L'essentiel

  • Les jeunes participent activement à la croissance du marché du luxe. D’ici à 2026, ils pourraient représenter 75 % des acheteurs de produits de luxe selon l’enquête True-Luxury Global Consumer Insight 2023, publiée en juillet dernier.
  • Les grandes maisons françaises ont des milliers de postes vacants qu’elles peinent à combler. Pour revaloriser leurs métiers auprès des jeunes, elles tentent différentes approches.
  • Mais LVMH, Cartier ou Hermès ont fort à faire : les filières d’excellence n’ont pas le clinquant des produits qui sortent des ateliers.

Le luxe, son imaginaire, fait rêver les jeunes ; ses métiers beaucoup moins. Laurent Boillot, président du Comité Colbert, expliquait en juillet 2023 au Figaro qu’il manquait 20.000 artisans du luxe. Pour les pourvoir, les grandes maisons sillonnent les quatre coins de la France à la recherche de « zoomers », l’autre nom de la génération Z, à séduire. Une cible qui peut paraître naturelle, car encore en formation ou débutante sur le marché de l’emploi, mais loin d’être évidente.

En témoignent les initiatives comme celle du Comité Colbert, qui réunit de grandes maisons dont Hermès ou Cartier. Pour la seconde année consécutive, l’association organisait, en décembre dernier, Les De(ux) mains du luxe à Paris. Le concept ? Faire découvrir aux jeunes générations les métiers et les opportunités de formation.

L’élitisme apparent du luxe effraie

De la même manière, LVMH, qui compte avec Louis Vuitton la deuxième marque de luxe préférée des 18-24 et la quatrième chez les 13-17 ans selon la dernière étude YPulse, entame une nouvelle édition de sa tournée You and Me. Avec, là encore, l’idée de nouer le dialogue et de valoriser des professions méconnues. D’après Alexandre Boquel, directeur des métiers d’excellence chez LVMH, « ces métiers souffrent de ne pas avoir été assez mis en avant. Depuis la révolution industrielle, on valorise davantage les professions d’ingénieur ou d’avocat, et pas forcément les carrières dans la vigne ou le cuir. » Alors que la demande est là : actuellement, 3 500 offres d’emploi seraient à pourvoir au sein du groupe, sous différentes formes (stage, alternance, CDD, CDI).

Si les RH de LVMH manquent de jeunes candidatures, c’est peut-être à cause de l’image du luxe, un secteur aussi fascinant qu’intimidant : « Les gens imaginent que, dès qu’on intègre l’excellence, il faut immédiatement avoir une perfection d’exécution, regrette Alexandre Boquel. Mais nous sommes là pour leur apprendre. »

Autre difficulté, là encore associée à l’imaginaire du secteur, le cliché selon lequel il n’y aurait de l’emploi que dans la capitale : « Le milieu peut faire croire à une dimension très parisienne, très fermée. C’est pour ça qu’on a vraiment voulu être itinérants dans notre initiative de recrutement. Nos maisons sont sur tout le territoire avec 110 ateliers répartis dans différentes régions. »

A la recherche de sang neuf

Lola, alternante de 22 ans dans une maroquinerie du groupe, fait partie des prises des précédentes tournées You and Me, qu’elle a connues après des recherches sur Internet. Selon elle, la clef pour toucher les 18-25 ans passe aussi par la communication en ligne : « Il y a peut-être un effort à faire sur le choix des réseaux sociaux pour mieux taper dans l’œil de notre génération. »

Naturellement, la question salariale a son rôle à jouer. Et là-dessus, Alexandre Boquel confirme que son groupe est « en permanente discussion avec les partenaires sociaux pour valoriser les salaires. » Selon Letudiant.fr, dans les métiers d’artisanat, les paies oscillent entre le smc et un peu plus de 2.000 euros en début de carrière. Pas vraiment le grand luxe. S’il veut recruter auprès des jeunes, le secteur doit se préparer à faire du sur-mesure.


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