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En chiffres

Pacte enseignant : l'Education nationale présente un « bilan positif » très contesté

Depuis septembre dernier, 30 % des enseignants ont signé le pacte, pour un gain moyen annuel brut de 2.408 euros et un montant total de 700 millions d'euros, selon un bilan du ministère de l'Education nationale. Les coupes budgétaires touchent aussi le pacte.

Dans les lycées généraux et technologiques, 24 % des enseignants ont adhéré au pacte, selon le ministère de l'Education nationale.
Dans les lycées généraux et technologiques, 24 % des enseignants ont adhéré au pacte, selon le ministère de l'Education nationale. (FRANCOIS GUILLOT/AFP)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 17 avr. 2024 à 18:20Mis à jour le 17 avr. 2024 à 19:01

C'est « un succès ». Le ministère de l'Education nationale s'est félicité, mardi soir, d'un premier bilan « positif » du pacte enseignant, cet ensemble de missions supplémentaires proposées aux volontaires, notamment pour remplacer des professeurs absents, une priorité affichée par Emmanuel Macron .

En septembre dernier, les enseignants s'étaient vus proposer jusqu'à trois briques de pacte , à raison de 1.250 euros l'une, pour faire du remplacement ou des missions particulières (stages de réussite, soutien aux élèves, etc.)

Un gain moyen annuel brut de 2.408 euros

« L'adhésion des agents s'établit en moyenne à 30 %, conformément à l'objectif fixé », souligne le ministère. Au total, 255.000 enseignants ont signé le pacte, pour un gain moyen annuel brut de 2.408 euros par personne et pour un montant total de 700 millions sur l'année scolaire 2023-2024.

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Sauf que la « cible » affichée il y a un an par l'Education nationale n'était pas celle-là : le ministère expliquait alors que l'objectif était d'avoir « un tiers des professeurs sur du pacte complet, soit trois missions ». « Si chaque professeur prend une mission, on touchera plus d'enseignants et on ne sera pas loin des 850.000 professeurs potentiellement concernés par le pacte », indiquait l'entourage de l'ex-ministre de l'Education, Pap Ndiaye.

Le ministère affirme aujourd'hui ne pas être en mesure de détailler les résultats par briques, tout en précisant que les 255.000 enseignants adhérents n'ont pas tous signé un pacte complet.

 Deux millions d'heures d'absences de courte durée, sur 13 millions, ont pu être comblées.

Nicole Belloubet Ministre de l'Education nationale

Dans le détail, le bilan a comptabilisé 24 % d'adhérents parmi les enseignants du premier degré, 24 % d'adhérents aussi dans les lycées généraux et technologiques. Mais les adhérents des collèges et des lycées professionnels sont mélangés dans une même catégorie, ce qui jette la suspicion sur la sincérité du bilan, selon plusieurs syndicats.

Les chiffres d'adhésion sont traditionnellement plus élevés dans les lycées professionnels, où le pacte sert « à remplacer des enseignants de longue durée sur des disciplines rares », relève Sylvie Perron, proviseure et secrétaire nationale du Sgen-CFDT.

« Garderie nationale »

Le taux de remplacement de courte durée « est passé de 5 à 15 % » et « la mise en place du pacte enseignant a significativement amélioré les choses », avait indiqué la ministre de l'Education nationale, Nicole Belloubet, le 3 avril, au Sénat. Mais sur quelles bases ont été calculés ces 5 % qui servent de référence ? Plusieurs syndicats évoquent des données « peu fiables ». « On fait dire aux chiffres ce qu'on veut », regrette encore Sylvie Perron en évoquant « l'impression d'avoir un bilan au doigt mouillé ».

« Il n'y a pas de données consolidées, tout ceci donne l'impression d'une grande désinvolture », s'agace Sophie Vénétitay, secrétaire générale du SNES-FSU, principal syndicat du second degré.

Le remplacement de courte durée est « la mission la plus mobilisée » (31 % des parts du second degré), assure le ministère. Selon Nicole Belloubet, « 2 millions d'heures d'absences de courte durée, sur 13 millions, ont pu être comblées ». Mais, dans près de la moitié des cas, un professeur absent est remplacé par un collègue d'une autre discipline. Seuls 56 % des remplacements de courte durée se font dans la même discipline, déplore Sophie Vénétitay, qui s'insurge contre ce qu'elle qualifie de « garderie nationale ».

« Des économies sur les heures supplémentaires »

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Ce qui a été fait sur le remplacement de courte durée « n'est pas encore satisfaisant et nous continuerons de mobiliser ce pacte pour améliorer ce taux », a promis Nicole Belloubet. « L'année scolaire 2024-2025 permettra de progresser encore en termes de mobilisation des personnels au travers » du pacte, insiste le ministère.

Pour augmenter le nombre d'adhérents, l'exécutif a prévu un tour de passe-passe que les syndicats redoutaient depuis la mise en place du pacte. Emmanuel Macron a annoncé, le 5 avril, une rallonge de 98 millions d'euros pour développer le pacte à la rentrée prochaine. Mais le ministère s'apprête à faire des coupes dans le budget des heures supplémentaires, qui pourraient être du même niveau… « Il y aura bien des économies sur les heures supplémentaires, confirme le ministère sans en préciser le montant. Nous devons faire des efforts budgétaires sur les enveloppes ouvertes pour 2024. »

L'annonce faite mardi soir aux syndicats a suscité de vives réactions. D'autant que le ministère vient aussi de stopper net les nouvelles signatures de pacte pour cette année scolaire. Inspecteurs et chefs d'établissement, qui en ont été avisés par mail du jour au lendemain, ne décolèrent pas.

Sur les 900 millions prévus au titre du pacte, 700 millions ont été dépensés. Le gouvernement reprend ainsi 200 millions. « Le pacte est versé avant service fait, indique-t-on au ministère. En continuant les adhésions, nous prenons le risque que les missions ne soient pas intégralement mises en oeuvre. » Il faut éviter « un dépassement budgétaire ». L'Education nationale expliquait pourtant il y a un an qu'il n'y aurait pas de limite à la signature du nombre de pactes.

Marie-Christine Corbier

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