Rentrée scolaire : "Parcoursup fait de la casse dans les secteurs défavorisés"

Même à la fac, les places sont chères. Nombre de candidats se retrouvent  à accepter des filières à défaut pour ne pas se retrouver sans rien

Même à la fac, les places sont chères. Nombre de candidats se retrouvent à accepter des filières à défaut pour ne pas se retrouver sans rien

Photo lp

Quatre ans après sa mise en place par Jean-Michel Blanquer, la plateforme d’accès à l’enseignement supérieur convainc peu ou pas.

Une sélection précoce, des éléments flous, une logique non élucidée, des algorithmes tout puissants... "Parcoursup, c’est un grand mystère, une boîte noire !", lâche Laurent Malfettes, président de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) du lycée Marseilleveyre (8e).

"Les critères sont opaques, les lettres de motivation ne sont pas lues et la sélection se fait trop tôt. Elle se base uniquement sur trois trimestres entre les classes de première et terminale alors que l’année n’est pas finie. Cela démobilise les jeunes qui viennent au lycée les mains dans les poches dès le mois de mars et encourage l’absentéisme le jour des examens, comme cela s’est vu à l’épreuve de philo. Cela écarte aussi les élèves qui feraient un sprint final intéressant au quatrième trimestre et ignore la mention. C’est donc le contrôle continu qui pèse le plus et crée de fait une inégalité."

Auparavant, les lycéens montaient des dossiers papiers qui étaient étudiés en commission par les enseignants des formations demandées. C’étaient donc des gens qualifiés qui décidaient de l’avenir des enfants et non un logiciel. Avec Parcoursup, la garantie d’une place dans le supérieur après l’obtention du fameux sésame est un leurre.

Des jeunes hors circuit

Un système aussi critiqué par des profs et travailleurs sociaux qui luttent sur le terrain pour faire raccrocher une jeunesse frustrée, perdue.

"Parcoursup fait de la casse dans les secteurs défavorisés. Dès qu’un élève entre en première, on lui dit d’être irréprochable sur le comportement, l’assiduité et les notes. Il donne tout et une fois le bac validé, on n’accepte pas ses choix. Le minot a le sentiment de s’être fait avoir ! Dans les quartiers Nord, tout le monde n’a pas la grille de lecture quand les établissements privés ont bien compris qu’ils misaient leur réputation sur l’orientation post-bac. Entre les appréciations, les évaluations, les mots-clefs... ils parviennent à déchiffrer la machine. Même dans l’Éducation nationale, il n’y a pas d’égalité et aujourd’hui c’est la fac qui joue à guichets fermés", déplore Salim Grabsi, prof de labo à Diderot et cofondateur du Sel de la Vie qui a lancé le dispositif "détection, accompagnement, orientation. Des jeunes partent dans une formation à défaut qu’ils finiront par abandonner, d’autres n’ont rien et se retrouvent démunis à la maison. C’est un gaspillage immense ! Il faut que le ministère ait l’humilié de reconnaître que ça ne marche pas."

De son côté, le syndicat étudiant Unef appelle à supprimer Parcoursup et revenir à un mode plus sensé et inclusif. "C’est trop obscur et la sélection a été déshumanisée. Nous prônons une université libre, gratuite, accessible à tous ceux qui souhaitent faire des études. Là, on laisse des jeunes motivés sans solution après le lycée, dénonce Bilal Chorfi, secrétaire général de l’Unef à Aix-Marseille Université. Certains ont passé l’été dans une attente morbide à actualiser leurs vœux. C’est stressant et surtout pas le cadre idéal pour aborder le supérieur. Ça fait aussi le jeu des établissements privés qui compensent la destruction du service public et ça crée encore une sélection par l’argent."